Barack Obama a infligé mercredi un rare camouflet à son homologue russe Vladimir Poutine en annulant leur sommet de septembre, décision justifiée par le manque de «progrès récents» dans les relations bilatérales en pleine affaire Snowden.

Si la Russie s'est dite «déçue» de cette décision qu'elle a interprétée comme un refus des États-Unis de coopérer avec elle «sur un pied d'égalité», ni Moscou ni Washington n'ont parlé de rupture.

Ainsi, la rencontre prévue en fin de semaine dans la capitale fédérale entre les secrétaires d'État et à la Défense américains et leurs homologues russes reste a priori au programme, selon la Maison Blanche.

«Nos relations avec les Russes sont importantes, nous parlons de nombreux sujets et nous avons réussi à coopérer, et à trouver de nouveaux domaines de coopération», a affirmé le porte-parole du président Obama, Jay Carney, mercredi soir.

«Une partie de cette coopération continue, dont  l'approvisionnement de nos soldats en Afghanistan (...) ce n'est pas une situation toute blanche ou toute noire», a expliqué M. Carney aux journalistes dans l'avion présidentiel Air Force One.

Plus tôt mercredi, ce porte-parole avait annoncé l'annulation du sommet, expliquant que de l'avis de Washington, les «relations bilatérales avec la Russie n'ont pas enregistré assez de progrès récents pour qu'un sommet américano-russe se déroule début septembre».

Le principe d'une telle rencontre avait été annoncé en marge du G8 en juin.

Mais la Maison Blanche avait laissé planer le doute depuis des semaines sur le maintien de cette rencontre préalable au G20 de Saint-Pétersbourg, alors que les relations entre Moscou et Washington se sont fortement détériorées en raison en particulier de l'asile accordé par les Russes à l'Américain Edward Snowden, ancien analyste qui a révélé l'ampleur du programme de surveillance des communications électroniques par le renseignement de son pays.

«Mentalité de la Guerre froide»

«Etant donné le manque de progrès sur des questions comme la défense antimissile, la prolifération, le commerce, les questions de sécurité et des droits de l'homme ces 12 derniers mois, nous avons informé le gouvernement russe que nous pensions qu'il serait plus constructif de repousser le sommet jusqu'à ce que nous obtenions plus de résultats», avait développé M. Carney.

L'expression «ces 12 derniers mois» semble mettre en cause le rôle de M. Poutine, qui a repris les rênes du Kremlin en mai 2012.

Les relations américano-russes ont connu depuis un coup de froid notamment en raison du dossier syrien.

En outre, «la décision décevante de la Russie d'accorder un asile temporaire à Edward Snowden a aussi été un élément que nous avons pris en considération pour évaluer l'état de nos relations», a remarqué le porte-parole américain.

La participation de M. Obama au G20 les 5 et 6 septembre n'est pas remise en cause, selon la Maison-Blanche, qui a aussi confirmé, après une annonce de Stockholm, que le président se rendrait en visite officielle en Suède avant d'aller à Saint-Pétersbourg.

Mardi, M. Obama avait reproché à la Russie de revenir parfois à «une mentalité de la Guerre froide».

«Ce que je dis en permanence (aux responsables russes), ce que je dis au président Poutine, c'est que c'est le passé et que nous devons penser à l'avenir. Et il n'y a pas de raison pour que nous ne puissions pas être en mesure de coopérer plus efficacement que nous ne le faisons», avait-il déclaré lors d'un entretien télévisé.

Pour Steven Pifer, spécialiste de la Russie à l'institut Brookings de Washington, l'annulation d'un sommet d'aussi haut niveau est pour le moins «inhabituelle», mais pas surprenante vu les désaccords persistants entre les deux capitales où l'affaire Snowden ne constituait selon lui qu'un «élément mineur».

Ce développement représente «une sérieuse turbulence, mais le fait que l'administration maintienne la rencontre ministérielle montre à mon avis qu'ils sont prêts à coopérer là où c'est possible», assure toutefois M. Pifer.