L'image de l'Américain blanc pourrait bientôt devenir caduque.

La population blanche meurt à un rythme plus rapide qu'elle n'est remplacée par les naissances aux États-Unis, une première. Le phénomène n'avait pas été observé en temps de guerre, ni même durant la Grande Dépression.

«L'impact de ces changements sera majeur, explique en entrevue Larry Gerston, auteur et professeur émérite au département de science politique de l'Université de San Jose. Sur le plan politique, il est pratiquement impossible à surestimer.»

Annoncées par le Bureau du recensement des États-Unis jeudi, les dernières statistiques ont surpris les experts: le phénomène était attendu, mais pas avant une décennie, voire plus.

Aujourd'hui, 49% des enfants de 5 ans ou moins sont issus des minorités visibles, note le Bureau. Dans les États du Sud, la tendance est même plus prononcée: au Texas, ce sont 66% des élèves fréquentant les écoles publiques qui sont issus des minorités visibles. En Californie, où résident 38 millions de personnes, la population hispanique devrait supplanter la population blanche d'ici la fin de cette année, selon les données du gouvernement.

Conséquence de ce changement: les préoccupations des minorités ne seront plus en périphérie des programmes des partis politiques, mais bien au centre, note M. Gerston.

«Aux dernières élections, Barack Obama a reçu 73% du vote des Asio-Américains, 71% du vote des Américains hispaniques et 95% du vote des Américains noirs. Ce sont des résultats écrasants. Les républicains ne peuvent plus se permettre d'avoir la tête dans le sable.»

Si les républicains avaient obtenu 40% du vote latino aux dernières élections, «ils auraient probablement remporté la Maison-Blanche», ajoute M. Gerston.

Pour l'heure, le déclin détecté par le Bureau du recensement est symbolique: pour l'année qui prenait fin en juin 2012, la population blanche américaine de 198 millions a diminué de 12 400 personnes.

Cette tendance est appelée à s'accentuer dans les décennies à venir. L'âge médian des Blancs est de 42 ans, alors qu'il est de 34 ans pour les Asio-Américains, de 32 ans pour les Noirs et de moins de 28 ans chez la population hispanique. Le Bureau note que la population latino, celle qui connaît l'essor le plus fulgurant, est de plus en plus éduquée. Le nombre de Latinos titulaires d'un diplôme universitaire a grimpé de 80% au cours de la dernière décennie.

Sur le plan national, le Bureau du recensement estime que la population blanche deviendra minoritaire d'ici trois décennies.

À moyen terme, les membres des minorités visibles pourront changer les États républicains en États démocrates, si la droite américaine ne renverse pas la vapeur, note M. Gerston.

«Le Nevada est devenu bleu, le Nouveau-Mexique est devenu bleu, l'Arizona pourrait bientôt devenir bleu. Le danger pour les républicains est de devenir le parti des sudistes blancs âgés. C'est déjà en train de se produire.»