Barack Obama a soutenu mardi un vaste projet de réforme du système d'immigration et mis en garde les élus qui seraient tentés de le bloquer, au moment où le Sénat entamait ses débats en séance plénière sur cette grande promesse électorale du président américain.

Précédé dans la salle d'apparat de la Maison-Blanche par une jeune Nigériane sans papiers qui verrait s'ouvrir à elle un accès à la nationalité américaine si cette réforme était votée, M. Obama a défendu la nécessité de «réparer un système dysfonctionnel», incapable selon lui de régler le problème des quelque 11,5 millions de clandestins vivant dans le pays.

Soulignant que le projet de loi élaboré au Sénat par ses alliés démocrates et ses adversaires républicains renforcerait encore les défenses des frontières - une condition préalable pour nombre d'élus conservateurs -, M. Obama a estimé que ce texte contenait des mesures «de bon sens», soutenues par une majorité d'Américains de tous les horizons politiques selon lui.

Tant Tom Donohue, président de la Chambre de commerce américaine, groupe de pression des industriels, que Richard Trumka, chef du puissant syndicat AFL-CIO, ont défendu cette réforme mardi face aux journalistes à la Maison Blanche, M. Donohue affirmant la «soutenir vigoureusement».

«Il n'y a aucune raison que le Congrès ne parvienne pas à boucler ce dossier avant la fin de l'été», a lancé pour sa part M. Obama.

Il avait fait campagne pour sa réélection l'année dernière en promettant une telle réforme, et a dû sa nette victoire en particulier au soutien des minorités: plus de 70% des Hispaniques avaient ainsi voté pour lui.

Ce chiffre a conduit des républicains de premier plan à s'engager à leur tour en faveur d'une réforme de l'immigration, notamment le jeune sénateur de Floride Marco Rubio, l'un des possibles candidats à la présidentielle de 2016.

M. Rubio fait partie du groupe de huit sénateurs ayant parrainé ce projet de loi, qui a franchi un nouveau cap mardi lors d'un vote de procédure au Sénat.

Rejet d'une «amnistie»

Le texte ouvrirait la voie de la régularisation aux clandestins, à condition de payer une amende, de ne pas dépendre des aides sociales et de n'avoir pas commis de délit majeur. Au bout de 13 ans, ils pourraient demander leur naturalisation.

Mardi, 82 sénateurs sur 100 ont voté pour formellement lancer les débats, un signe que de nombreux élus des deux partis sont favorables à la réforme. Pour le vote final, attendu au Sénat début juillet, les partisans espèrent atteindre une majorité forte de plus de 60 voix.

Depuis les régularisations massives de 1986, les tentatives de réforme ont toutes échoué, notamment sous la présidence du républicain George W. Bush en 2007.

Si jamais la réforme passait le cap du Sénat, elle serait vraisemblablement modifiée par la Chambre des représentants, où les républicains détiennent la majorité absolue. Leurs élus sont plus conservateurs qu'au Sénat et nombre d'entre eux ont manifesté leur hostilité à une loi qui s'apparenterait selon eux à une «amnistie».

«Il va falloir apporter des changements majeurs à ce texte, si on veut qu'il devienne loi», a averti Mitch McConnell, le chef républicain du Sénat, en réclamant des mesures pour rendre la frontière avec le Mexique plus étanche.

Certains conservateurs, tels que le Texan John Cornyn, veulent interdire toute régularisation durable jusqu'à ce que la police aux frontières soit capable d'appréhender la quasi-totalité des clandestins tentant d'entrer sur le territoire.

Le succès d'un texte sur l'immigration permettrait enfin à M. Obama d'étoffer le bilan législatif de son second mandat, après l'échec d'une réforme de l'encadrement des armes à feu et l'entrée en vigueur d'une cure d'austérité forcée en mars, faute d'accord des deux camps sur la fiscalité.