La pression montait d'un cran aux États-Unis lundi sur celui qui a fuité l'existence d'un vaste système d'espionnage des communications, Edward Snowden, alors que ses faits et gestes depuis son départ de Hong Kong demeuraient un mystère.

La sénatrice démocrate Dianne Feinstein, présidente de la commission du renseignement et poids-lourd du Congrès, a parlé «d'un acte de trahison» et réclamé son extradition aussi vite que possible. «Tous les ministères s'activent vivement» en ce sens, a-t-elle dit aux médias.

Snowden fait toujours l'objet d'une enquête du ministère la justice.

Le sénateur démocrate Bill Nelson a lui aussi appelé à son extradition. «Nous ne pouvons pas garantir la sécurité nationale si les secrets sur nos méthodes de renseignement ne sont pas gardés», a-t-il déclaré à l'AFP.

Une éventuelle extradition, si elle est demandée par Washington, pourrait se heurter au veto de Pékin. Mais l'accord d'extradition entre Washington et Hong Kong «est encore en vigueur et nous l'avons utilisé activement au fil des ans», a rappelé la porte-parole du département d'État.

L'ancien consultant du renseignement américain a toutefois quitté son hôtel de Hong Kong, selon le New York Times. Il s'y était réfugié après avoir donné au quotidien britannique The Guardian et au Washington Post des informations confidentielles sur des pans entiers du programme de surveillance de l'Agence nationale de sécurité (NSA).

Le fugitif est sorti de l'ombre dimanche dans un entretien vidéo publié par le Guardian. «Mon unique objectif est d'informer les gens de ce qui est fait en leur nom et de ce qui est fait contre eux», a-t-il expliqué.

Mais selon un sondage du Washington Post et de l'institut Pew publié lundi, 56% des Américains interrogés pensent que le programme fédéral de surveillance téléphonique est un moyen «acceptable» d'enquêter sur la menace «terroriste», quitte à empiéter sur la vie privée.

Le représentant républicain Pete King, traitant Snowden de «transfuge», a aussi rappelé sur CNN que révéler des informations classifiées pouvait coûter 15 à 20 ans de prison.

A Hong Kong, la députée pro-Pékin Regina Ip a jugé que la ville serait «obligée d'honorer les accords» passés avec Washington.

«Tribunaux secrets»

Mais la jeune «taupe» de 29 ans, qui a dit sacrifier sa famille voire risquer sa vie «pour la démocratie», a aussi trouvé des supporteurs, dont Ron Paul, ancien candidat à l'investiture républicaine pour les élections présidentielles de 2012, que Snowden avait soutenu en contribuant financièrement à sa campagne.

Celui-ci a estimé que Snowden et le journaliste du Guardian ayant publié en premier l'information, Glenn Greenwald, avaient «rendu un grand service aux Américains en révélant la vérité sur ce que (le) gouvernement fait en secret».

Son fils, le sénateur Rand Paul, a annoncé son intention d'intenter une action collective en justice contre l'État fédéral, pour laquelle il espère rassembler 10 millions d'Américains.

L'ancien agent de la CIA, qui a travaillé pour des sous-traitants de la NSA, s'est réfugié à Hong Kong le 20 mai après avoir copié les derniers documents qu'il voulait divulguer, selon le Guardian.

Il a déclaré qu'il envisageait de demander l'asile politique en Islande.

En France, la présidente du Front national Marine Le Pen a demandé que Paris lui accorde l'asile politique. «Edward Snowden doit être mis en sécurité au plus vite» car il «a eu le courage et l'immense mérite de révéler à l'humanité une menace très grave contre la démocratie et nos libertés publiques», a-t-elle estimé.

Une pétition publiée sur le site de la Maison-Blanche pour réclamer son «pardon» avait été signée lundi après-midi par plus de 25 000 personnes.

Plus tôt dans sa brève carrière américaine, Edward Snowden avait essayé, en vain, d'intégrer les forces spéciales de l'armée, a par ailleurs confirmé un porte-parole du Pentagone.

La grande association américaine de défense des libertés individuelles (Aclu) a demandé aux tribunaux secrets (Fisa), qui ont notamment ordonné à l'opérateur Verizon de livrer ses données téléphoniques, d'en dire plus sur l'étendue de leurs pouvoirs.

Le Guardian et le Washington Post ont révélé la semaine dernière deux programmes secrets de la NSA basés sur la collecte de données téléphoniques et internet. Barack Obama les a défendus au nom de la sécurité des Américains.

Ces fuites ont commencé à traverser les frontières. Au Royaume-Uni, le Guardian a affirmé que les espions britanniques avaient accès au programme américain, tandis qu'au Canada, le Globe and Mail a révélé que le gouvernement pilotait une surveillance similaire.