Le président birman Thein Sein se rendra à Washington dans un avenir proche pour une visite bilatérale historique, a annoncé la télévision d'État lundi soir, point d'orgue du soutien américain aux réformes politiques menées depuis deux ans par l'ancien général.

La télévision publique a annoncé ce voyage sans évoquer de dates précises, confirmant une information obtenue par l'AFP début mai de source parlementaire américaine. Un responsable birman a confirmé à l'AFP avoir été informé de ce voyage sans en préciser la date.

Thein Sein deviendra ainsi le premier dirigeant du pays asiatique, longtemps banni de la communauté internationale pour ses violations des droits de l'homme, à se rendre en visite à Washington depuis Ne Win en 1966. Le chef de la junte alors au pouvoir y avait été invité par le président Lyndon Johnson.

Thein Sein devrait rencontrer Barack Obama à la Maison-Blanche, signe de la volonté des États-Unis de soutenir le processus politique entamé en mars 2011 avec l'auto-dissolution de la junte, et qui a conduit notamment à la levée des sanctions internationales après l'élection de l'opposante Aung San Suu Kyi au parlement.

La lauréate du prix Nobel de la paix, qui a passé 15 ans privée de liberté sous la junte, est désormais la patronne de l'opposition et une des forces politiques majeures du processus politique.

Autre étape dans la normalisation des relations bilatérales, Washington a récemment mis un terme à son embargo de 1996 sur les visas accordés aux Birmans accusés d'avoir fait obstacle à la démocratie.

Les États-Unis reconnaissaient par cette mesure «les importants changements» en cours et encourageaient «le gouvernement et la population birmane à continuer sur le chemin des réformes», avait alors expliqué un responsable du Département d'État à l'AFP.

Barack Obama avait effectué une visite historique en Birmanie en novembre dernier, juste après sa réélection. Il avait loué la transition en cours, mais également appelé de ses voeux d'autres réformes, notamment concernant les minorités ethniques.

Thein Sein s'était pour sa part déjà rendu en septembre aux États-Unis pour assister à l'Assemblée générale de l'ONU. Mais il n'avait à cette occasion participé qu'à des réunions à New York.

Depuis la dissolution de la junte, son équipe a multiplié les mesures radicales, levant la censure, autorisant les manifestations et libérant des centaines de prisonniers politiques, tout en libéralisant une économie exsangue, fermée pendant un demi-siècle par l'ancienne dictature militaire.

Sa visite promet pourtant d'être compliquée par les critiques qui se sont abattues suite aux violences déplorées en 2012 contre les musulmans, notamment la minorité apatride des Rohingyas.

L'association Human Rights Watch a récemment accusé la Birmanie de «mener une campagne de nettoyage ethnique» contre les Rohingyas, qui sont quelque 800 000 confinés dans l'État Rakhine (ouest). Deux vagues de violences l'an passé y ont fait quelque 200 morts et au moins 140 000 déplacés.

Naypyidaw a farouchement nié ces accusations. Mais d'autres violences meurtrières ont touché ces derniers mois des Birmans musulmans du centre du pays, faisant plus de 40 morts.

Elles ont témoigné de tensions religieuses explosives qui menacent gravement une société multi-ethnique, soumise à des tensions croissantes au fur et à mesure que la société teste les nouvelles limites de sa liberté.

Dans son dernier discours à la Nation le 6 mai, Thein Sein a promis de garantir les droits des musulmans et de bâtir une société tolérante.