Ariel Castro, inculpé pour la séquestration et le viol de trois jeunes femmes pendant une dizaine d'années dans sa maison de Cleveland, a brièvement comparu jeudi matin devant un tribunal de la ville.

Menotté, les yeux rivés vers le sol, ce chauffeur de bus au chômage de 52 ans n'a pas prononcé un mot durant cette audience de quelques minutes. Vêtu d'une tenue de détention bleu foncé, il a soigneusement évité les regards et n'a manifesté aucune réaction à la lecture des charges pesant contre lui.

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Le tribunal a fixé une caution de deux millions de dollars pour chaque cas, soit huit millions de dollars au total, s'assurant ainsi de son maintien en détention.

Le procureur Bryan Murphy, qui a réclamé cette caution, a fait valoir «l'horrible calvaire» subi par les victimes.

«Deux des victimes ont supporté un horrible calvaire durant plus de dix ans, une troisième durant près d'une décennie, et ce supplice a fini par donner naissance à une petite fille dont on pense qu'elle est née d'une des captives», a-t-il dit, soulignant aussi les «coups répétés» reçus par les victimes et les «agressions sexuelles» dont elles ont été victimes.

Selon Kathleen DeMetz, avocate commise d'office du suspect, il devait être placé sous surveillance particulière pour éviter toute tentative de suicide.

Dans une lettre datant de 2004, retrouvée chez lui et comptant parmi environ 200 éléments de preuves étudiées par la police, Ariel Castro affirmait être un «prédateur sexuel» et exprimait le désir de mettre fin à ses jours, ont rapporté des médias locaux.

«Je suis un prédateur sexuel. J'ai besoin d'aide», indique la note, où il raconte avoir enlevé deux victimes, et en chercher une troisième. «Elles sont ici contre leur volonté parce qu'elles ont commis l'erreur de monter dans la voiture d'un étranger», écrit-il.

Lors de la brève audience de jeudi, les deux frères d'Ariel Castro, qui avaient été interpellés en même temps que lui mais contre lesquels aucune charge n'a été retenue dans cette affaire, ont été remis en liberté.

«Ariel a tenu tout le monde à l'écart», avait expliqué mercredi le chef adjoint de la police de Cleveland, Ed Tomba.

Il avait été inculpé mercredi de viols et de quatre séquestrations: celle d'Amanda Berry et de sa fille de 6 ans Jocelyn, née en captivité, de Gina DeJesus et de Michelle Knight, toutes quatre libérées lundi soir grâce à l'aide d'un voisin.

«Elles n'étaient pas dans la même pièce»

Les conditions de détention de ses victimes continuent d'être divulguées au compte-gouttes.

Selon M. Tomba, les trois femmes ne seraient sorties de la maison où elles étaient prisonnières qu'à deux brèves reprises, et uniquement pour aller dans le garage après avoir dû se «déguiser».

Le chef de la police Michael McGrath a confirmé qu'«elles étaient attachées» après avoir retrouvé «des chaînes et des cordes dans le couloir».

«Elles n'étaient pas dans la même pièce, mais elles se connaissaient et savaient que les autres étaient là», a précisé M. Tomba, sans confirmer des informations de presse selon lesquelles les jeunes femmes seraient plusieurs fois tombées enceintes.

Un voisin, Roberto Diaz, cité par le Washington Post, affirme qu'Ariel Castro participait à des événements menés pour retrouver les filles disparues, comme des marches en leur honneur ou des distributions de tracts.

L'oncle d'Ariel Castro, Julio, raconte cependant que son neveu s'est isolé de la famille après la mort de son père en 2004, année de la disparition de Gina, un an après celle d'Amanda et deux ans après celle de Michelle.

En 2005, l'ancienne femme de Castro, Grimilda Figueroa, décédée l'an dernier, avait porté plainte contre lui, l'accusant d'avoir «souvent enlevé» leurs deux filles et de les avoir «empêché d'être avec (leur) mère».

Les documents judiciaires indiquent en outre que Grimilda Figueroa avait eu deux fois le nez brisé, des côtes cassées, les épaules luxées, et qu'elle avait demandé au juge «d'empêcher (Castro) de menacer de la tuer».

La police a reconnu être déjà allée à deux reprises à la demeure d'Ariel Castro: en mars 2000 pour une bagarre dans la rue, et en janvier 2004 au sujet d'Ariel Castro, chauffeur de bus scolaire, qui avait oublié un enfant dans un bus.

La police avait alors frappé en vain à la porte du domicile, sans obtenir de réponse.