L'alimentation forcée de détenus, une pratique actuellement en cours dans la prison américaine de Guantánamo où un nombre croissant de détenus sont en grève de la faim, n'est «jamais acceptable», a indiqué mercredi un porte-parole du Haut-commissariat de l'ONU aux droits de l'homme.

«Si c'est perçu comme un acte de torture ou un traitement dégradant - et c'est le cas, c'est douloureux - alors c'est interdit par la loi internationale», a déclaré à l'AFP Rupert Colville, faisant référence notamment à la convention contre la torture et autres peine ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Sur la question de l'alimentation forcée, l'ONU suit les directives de l'Association médicale mondiale (AMM), organisation internationale de médecins fondée en 1947 pour assurer les plus hautes normes possibles en matière d'éthique et de soins et qui compte les États-Unis parmi sa centaine de membres.

Or selon l'AMM, souligne M. Colville, «l'alimentation forcée n'est jamais acceptable».

«Même dans un but charitable, l'alimentation accompagnée de menaces, de coercition et avec recours à la force ou à l'immobilisation physique est une forme de traitement inhumain et dégradant», indique l'AMM dans sa Déclaration de Malte.

«Tout autant inacceptable est l'alimentation forcée de certains détenus afin d'intimider ou de contraindre les autres grévistes de la faim à cesser de jeûner», ajoute le document, cité par le porte-parole de l'ONU.

L'AMM précise que «l'alimentation artificielle peut se justifier sur le plan éthique si les grévistes de la faim l'acceptent. On peut aussi l'accepter si des personnes privées de leurs capacités n'ont pas laissé d'instructions préalables basées sur leur libre arbitre».

Les directives de l'AMM pour la prise en charge des grévistes de la faim prévoient que lorsqu'un prisonnier refuse toute nourriture et que le médecin estime que celui-ci est en état de formuler un «jugement conscient et rationnel» quant aux conséquences qu'entraînerait son refus de se nourrir, il ne doit pas être alimenté artificiellement.

En outre, la décision en ce qui concerne la capacité du prisonnier à exprimer un tel jugement doit être confirmée par au moins un deuxième médecin indépendant. Le médecin doit par ailleurs expliquer au prisonnier les conséquences que sa décision de ne pas se nourrir pourrait avoir sur sa santé.

La pression s'est accrue ces dernières semaines sur le président américain Barack Obama pour qu'il ferme cette prison militaire implantée à Cuba où 166 détenus sont toujours enfermés. Un mouvement de grève de la faim, entré dans sa 12e semaine, ne cesse de s'étendre et touche aujourd'hui 100 prisonniers, selon le bilan officiel de la prison, et 130 selon les avocats.