Deux ans après le Printemps arabe et ses espoirs de démocratisation, les États-Unis s'alarment de dérives autoritaires et répressives dans bon nombre de pays, de la Syrie à Bahreïn en passant par l'Irak, la Libye ou l'Égypte.

Pour la deuxième année consécutive, le département d'État a consacré vendredi une large part de son rapport mondial sur les droits de l'homme à ce mouvement historique sans précédent qui a révolutionné le monde arabe à partir de décembre 2010 en Tunisie.

Mais, plus pessimiste qu'il y a un an, Washington relève qu'en 2012 «l'espoir né aux premiers jours du Réveil du monde arabe a buté sur les dures réalités de transitions contestées et incomplètes».

Et cette «transition démocratique de la région ne se fera pas de manière linéaire et il y aura forcément des reculs», met en garde le département d'État.

En présentant à la presse le rapport 2012 de son ministère, le secrétaire d'État John Kerry a enfoncé le clou, critiquant des pays arabes «en transition» dont les «nouveaux gouvernements traînent les pieds pour garantir les droits des plus vulnérables et bâtir des institutions démocratiques».

En attribuant ses bons et ses mauvais points en matière de droits de l'homme, la diplomatie américaine fustige des «régimes autoritaires qui ont systématiquement réprimé le développement de sociétés civiles et d'institutions démocratiques», citant --sans toutefois les placer sur le même plan-- la Syrie, le Yémen, Bahreïn, l'Irak ainsi que l'Égypte et la Libye.

Le rapport dénonce par exemple pour l'Égypte «les violences sexuelles contre les femmes, la répression contre les ONG et les minorités religieuses et l'escalade dans les violations des droits de l'homme en Syrie», ravagée par un conflit depuis deux ans.

M. Kerry a répété que le président Bachar al-Assad «s'accrochait désespérément au pouvoir et répondait aux cris de liberté par la mort et le chaos».

«Tensions communautaires» à Bahreïn

Les États-Unis ont aussi dans le collimateur depuis quelques semaines l'Égypte du président islamiste Mohamed Morsi sur laquelle M. Kerry avait fait part il y a quelques jours de ses «vraies inquiétudes» en matière politique, économique et de droits de l'homme.

Le rapport du département d'État critique précisément les forces de sécurité égyptiennes qui n'ont pas su «protéger la minorité chrétienne copte».

Les pays du Golfe ont pour la plupart échappé au Printemps arabe, mais le Royaume de Bahreïn est secoué depuis deux ans par un conflit entre le pouvoir sunnite et l'opposition chiite. Là, les «tensions communautaires ont continué d'augmenter en 2012», s'inquiètent les États-Unis, dont la Ve Flotte siège à Bahreïn et qui sont donc en général prudents face à la crise politique qui agite ce pays.

Le tableau du département d'État n'est toutefois pas complètement noir.

Il salue ainsi les «percées démocratiques encourageantes», comme en Tunisie, mais aussi à l'occasion d'élections en Égypte et en Libye, où Washington a toutefois perdu son ambassadeur tué dans l'attentat du consulat de Benghazi le 11 septembre 2012.

À la même époque, en pleine vague de manifestations anti-américaines dans le monde arabe, le président américain Barack Obama avait salué devant l'Assemblée générale de l'ONU le «progrès» que représentait selon lui le Printemps arabe. Il avait brossé à l'époque un tableau plutôt optimiste de ces révolutions démocratiques qui avaient renversé des régimes autoritaires.