Le secrétaire d'État américain John Kerry a félicité jeudi la France pour son intervention «réussie» au Mali, mais son gouvernement s'est fait tirer l'oreille au Congrès pour sa frilosité à répondre à l'appel à l'aide de Paris au début de l'opération militaire il y a un mois.

Fidèle à la ligne que défendent les États-Unis sur le Mali, le nouveau patron de la diplomatie américaine a également plaidé pour une solution politique à la crise qui puisse déboucher sur des élections fin juillet.

M. Kerry, qui vient de prendre ses fonctions, a profité de premiers entretiens avec le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon pour saluer devant la presse «l'intervention française couronnée de succès» dans le nord du Mali contre des islamistes armés, dont ceux d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

Dans un entretien accordé à l'AFP le 1er février, le secrétaire à la Défense Leon Panetta avait déjà loué les forces françaises pour leur «progression spectaculaire» sur le terrain.

Pour aider Paris, engagée militairement depuis le 11 janvier, le président Barack Obama a donné l'ordre lundi d'allouer 50 millions de dollars à une aide militaire d'urgence, une enveloppe destinée aussi au Tchad qui soutient l'armée malienne.

Depuis le 21 janvier et après dix jours d'hésitations et de tractations, les États-Unis ont déployé des moyens de transport aérien pour appuyer l'effort de guerre français. Selon un responsable du Pentagone, à la date du 11 février, les avions-cargo C-17 américains avaient effectué 41 vols au profit de la France et du Tchad. Une vingtaine de missions de ravitaillement en vol ont également eu lieu et Washington fournit des renseignements.

«Tiédeur»

Malgré cette aide logistique, le département d'État et le Pentagone se sont fait vilipender jeudi par une commission du Congrès pour le manque d'enthousiasme dont ils auraient fait preuve face aux premières demandes d'assistance de la France à la mi-janvier.

Le président de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, à majorité républicaine, Ed Royce, a fustigé devant le secrétaire d'État adjoint pour l'Afrique, Johnnie Carson, et son homologue à la Défense Amanda Dory, la «tiédeur» de la réaction initiale américaine «pour répondre à l'appel de notre allié».

Paris «est un allié de l'Otan combattant des terroristes liés à Al-Qaïda (...), cela n'aurait pas dû être trop difficile» à soutenir, a attaqué M. Royce, donnant écho à ce qui se murmurait il y a un mois côté français, selon qui Washington aurait mis un peu trop de temps à se décider.

M. Panetta avait déjà répliqué qu'«il n'y a jamais eu, d'aucune façon, une quelconque réticence ici (au Pentagone, ndlr) ou à la Maison-Blanche à aider les Français».

«Le ministre Panetta a dit très clairement que dès que nous avons commencé à recevoir des demandes des Français, nous y avons répondu aussi vite que possible, comme des alliés convenables», a renchéri Mme Dory.

Plusieurs mois avant l'intervention française au Mali, des responsables américains, notamment M. Carson du département d'État, avaient exprimé leurs réticences devant une intervention militaire «antiterroriste» dans le nord du Mali qui ne s'accompagnerait pas d'un volet politique à Bamako.

Le nouveau secrétaire d'État a donc lui aussi insisté sur le retour de la démocratie au Mali, qui en est privé depuis le coup d'État de mars 2012.

«Nous exhortons le gouvernement à poursuivre le processus de transition politique jusqu'à des élections et à accélérer les négociations avec des groupes non extrémistes dans le Nord», a martelé M. Kerry. Sa porte-parole, Victoria Nuland, a parlé d'un scrutin fin juillet, sachant que le président malien par intérim Dioncounda Traoré avait dit qu'il espérait appeler son peuple aux urnes avant le 31 juillet.