Rares sont les dirigeants américains à avoir mis les pieds dans le palais de Bachar al-Assad en Syrie ou la bande de Gaza: c'est pourtant le cas du nouveau chef de la diplomatie américaine, John Kerry, qui a accumulé en 28 ans au Sénat une solide expérience internationale.

Depuis fin 2008 et son élection à la tête de la commission des Affaires étrangères du Sénat --le poste qu'il occupait jusqu'à présent--, John Kerry, 69 ans, s'est rendu en Afghanistan, au Pakistan, en Egypte, en Israël, à Gaza, en Syrie, en Jordanie, au Darfour, à Pékin...

Mieux, ou pire, selon les points de vue, il est le plus «français» des sénateurs américains: francophone, il a passé nombre d'étés dans une maison familiale à Saint-Briac, en Bretagne, au milieu de ses cousins dont l'écologiste français Brice Lalonde.

Mais son «passé français» lui vaut de vives attaques lors de sa candidature à la présidentielle de 2004. Ses adversaires le traitent régulièrement de «Français», en pleine guerre d'Irak.

Il se fait connaître de la plupart des Américains à cette occasion, en portant les couleurs démocrates contre George W. Bush. Il dénonce les mauvais renseignements ayant conduit au déclenchement de la guerre et fait du rétablissement du prestige américain une priorité.

Dans la chambre haute du Congrès, il compte parmi ses amis nombre d'élus de l'autre bord --à commencer par John McCain, le «tombeur» de celle qui devait initialement remplacer Hillary Clinton, Susan Rice. Le républicain a personnellement soutenu la candidature de son ami, et la quasi-totalité des sénateurs républicains ont voté en faveur de sa confirmation mardi.

Durant ses auditions parlementaires, John Kerry s'est vanté d'avoir «le Sénat et la diplomatie dans le sang» en dévoilant sa feuille de route, de l'Iran à la Chine en passant par le dossier israélo-palestinien et le changement climatique.

«Peu de personnes connaissent autant de présidents ou de Premiers ministres et ont une telle maîtrise de la politique étrangère», a loué le président Obama.

Francophone

Catholique, marié à l'héritière Heinz, Teresa, John Kerry est le fils d'un pilote de la Seconde Guerre Mondiale et diplomate. Il raconte s'être aventuré en vélo dans Berlin-Est, à l'époque où son père était en poste en Allemagne. Après des études à l'Université Yale, il s'engage dans l'armée et se bat au Vietnam --comme John McCain-- avant de dénoncer la guerre publiquement à son retour en 1971.

Au Sénat, il défend en vain un projet de loi sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le changement climatique, un dossier dont il a promis de faire une priorité comme secrétaire d'État.

Après l'élection de Barack Obama, il est envoyé en émissaire sur les dossiers chauds de la diplomatie, notamment au Moyen-Orient. C'est lui que le président dépêche à Islamabad pour tenter d'apaiser en mai 2011 les alliés pakistanais, qui n'avaient pas été informés par Washington du raid contre Oussama ben Laden sur leur territoire.

En février 2009, il est l'un des trois parlementaires américains à visiter la bande de Gaza, contrôlée par le Hamas, que les États-Unis considèrent comme un groupe terroriste.

Il rencontre plusieurs fois le président syrien en 2010, avant le déclenchement de la rébellion dans le pays.

Récemment, un responsable français à Washington se félicitait de sa connaissance du dossier malien et disait en espérer une coopération plus étroite.

Avec son départ du Sénat, John Kerry entre pour la première fois au gouvernement. A quelques heures de la fin de son mandat, il confiait: «Je suis très nostalgique, ce n'est pas facile».