Washington a déroulé mercredi le tapis rouge pour la Birmane Aung San Suu Kyi en lui remettant la prestigieuse médaille d'or du Congrès, avant une rencontre avec le président Barack Obama dont l'administration a levé les sanctions contre le président birman.

Signe des honneurs auxquels l'icône de la démocratie birmane a eu droit, le président Obama l'a reçue en fin de journée dans le célébrissime Bureau ovale de la Maison-Blanche.

Selon un compte-rendu de leur rencontre diffusé dans la soirée par la présidence, Barack Obama lui a fait part de son «admiration pour son courage» et a réaffirmé le soutien américain aux efforts de Mme Suu Kyi et du président birman Thein Sein «pour promouvoir des réformes politiques et économiques» dans le pays.

Devant les photographes qui immortalisaient cette entrevue historique entre deux prix Nobel de la paix, M. Obama et son hôte n'avaient pas fait de déclarations, se contentant d'échanger quelques mots à voix basse.

Plus tôt dans l'après-midi, Aung San Suu Kyi avait reçu sous la rotonde du Congrès américain la plus prestigieuse distinction civile aux États-Unis, une médaille d'or que l'institution lui avait décernée en 2008 lorsqu'elle était en résidence surveillée dans sa maison mythique et délabrée de Rangoun.

Mme Suu Kyi a remercié «du plus profond de (son) coeur le peuple américain pour nous avoir gardés dans vos coeurs et vos esprits durant les années sombres où la justice et la liberté semblaient hors de portée».

Devant 500 dignitaires américains et des Birmans en costume traditionnel, la «Dame de Rangoun», qui a passé 15 années privée de liberté, a confié vivre «l'un des jours les plus émouvants» de son existence.

La lauréate 1991 du prix Nobel de la paix est en Occident une icône de la lutte non violente pour la démocratisation, un processus encore inimaginable il y a deux ans en Birmanie.

La junte militaire, qui a tenu ce pays d'Asie du sud-est pendant un demi-siècle, a cédé la place en mars 2011 à un régime civil d'anciens généraux réformateurs. Le processus s'est déroulé sans effusion de sang et la Birmanie a changé de visage, notamment grâce à la libération de centaines de dissidents, la levée de la résidence surveillée de Suu Kyi fin 2010 et son élection à la députation en avril dernier.

«Aller de l'avant dans l'unité et la paix»

Celle qui est aujourd'hui une responsable politique de premier plan a reconnu qu'il y aurait «des difficultés sur notre route». Elle a assuré que «la Birmanie, nation aux multiples ethnies (...) pouvait aller de l'avant dans l'unité et la paix».

En recevant Mme Suu Kyi mardi, la secrétaire d'État Hillary Clinton avait exhorté «l'opposition et le gouvernement à travailler à l'unité du pays. La chef de diplomatie américaine s'était aussi inquiétée des violences communautaires entre bouddhistes et la minorité musulmane rohingya dans l'ouest du pays, ainsi que des liens continus entre la Birmanie et la Corée du Nord.

L'opposante avait aussi demandé aux États-Unis de lever toutes les sanctions imposées progressivement depuis les années 1990. Des restrictions qu'elle avait pourtant soutenues à l'époque pour faire pression sur les militaires alors au pouvoir.

En réponse mercredi, le Trésor américain a annoncé le retrait des noms du président Thein Sein et du président de la chambre basse du Parlement, Thura Shwe Mann, de la liste noire des personnes faisant l'objet de sanctions américaines pour leur participation à la répression politique en Birmanie.

Washington avait mis fin en juillet à la plupart des restrictions sur ses investissements en Birmanie, y compris dans le gaz et le pétrole. Un nouvel ambassadeur est en poste depuis juillet, une première depuis 22 ans.

Aung San Suu Kyi est à Washington depuis lundi pour un voyage de trois semaines à travers les États-Unis, où, comme en Europe en juin, elle reçoit un accueil aussi prestigieux que chaleureux.

Cette tournée américaine coïncide avec la venue du président Thein Sein, attendu la semaine prochaine à l'assemblée générale de l'ONU, pour la première fois en tant que chef de l'État.

Photo: AFP