Oak Creek, Aurora, Tucson: hasard du calendrier, ces trois fusillades meurtrières font l'actualité cette semaine aux États-Unis. Mais peu d'Américains semblent prêts à l'«examen de conscience» sur les moyens de réduire la violence demandé par Barack Obama.

«Les Américains ne sont pas prêts à un examen de conscience concernant les armes», indique à l'AFP Jeffrey Reiman, professeur de philosophie à l'American University de Washington: «Ils se sont déjà faits leur opinion», comme en témoignent les 258 millions d'armes dans le pays détenues par des personnes privées.

Lundi, au lendemain de la fusillade qui a fait 7 morts - dont le tireur présumé, un néonazi - dans un temple sikh d'Oak Creek, dans le Wisconsin, après avoir présenté ses condoléances et évoqué des événements «terribles et tragiques (qui) arrivent trop fréquemment», le président américain avait appelé à un «examen de conscience» pour trouver comment réduire la violence.

À peine quinze jours auparavant, 12 personnes avaient déjà été tuées dans un cinéma d'Aurora par un jeune homme de 24 ans, James Holmes. Une nouvelle audience devant la justice est prévue jeudi.

Hasard du calendrier, un autre jeune homme, accusé d'avoir tué en janvier 2011 six personnes à Tucson - une attaque au cours de laquelle l'élue Gabrielle Giffords avait été grièvement blessée - était présenté mardi devant la justice.

Et d'anciennes tueries particulièrement marquantes, comme celles survenues dans l'université de Virginia Tech (32 morts) en 2007 ou au lycée de Columbine (12 morts) en 1999, sont toujours présentes à l'esprit des Américains.

À chaque fois, la question du droit à porter des armes dans un pays où il est garanti par le deuxième amendement de la Constitution divise.

Près de 2000 usines de munitions aux États-Unis

«Ce n'est pas un examen de conscience qui va arrêter les tueurs en série. Ce n'est pas d'examen de conscience dont nous avons besoin, mais de meilleures lois sur les armes», affirme à l'AFP Adam Winkler, professeur de droit à l'université de Los Angeles.

«Il faut des garde-fous plus efficaces, cela n'empêchera pas les fous furieux de tuer en masse, mais cela peut réduire la violence par arme à feu qui est le fléau quotidien des villes américaines», dit-il.

Selon un sondage Gallup d'octobre 2011, 47% des Américains affirmaient alors détenir une arme chez eux, le chiffre le plus élevé en 20 ans et, à 26%, le nombre de personnes en faveur d'une interdiction n'avait jamais été aussi bas.

Selon le magazine Time citant des chiffres officiels, la fabrication de munitions est «une affaire qui marche de mieux en mieux», en croissance de 27% depuis début 2010 avec 1.996 usines recensées en mai.

Pour répondre à M. Obama, les internautes multipliaient les commentaires ces dernières heures sur les sites des journaux, divisés sur la question du port d'armes, mais unanimes dans la critique de l'appel du président.

M. Obama «veut nous enlever le droit de porter des armes comme ça, seuls ceux qui font des boulots de dingues et les criminels règneront sur les gens sans défense», estime William Molnar de Floride, sur le site de USA Today.

Sean Hamilton, de Boston, «n'a pas besoin d'examen de conscience. Ces fusillades sont des incidents isolés. Ce n'est la faute que des tueurs».

«Combien va-t-il falloir de tueries pour que nos dirigeants politiques disent quelque chose d'autre que l'équivalent d'une carte de condoléances?», demande au contraire «dwk» de Los Angeles sur le site du New York Times. «Sherman», de Californie, remarque que le mot «armes» n'a pas été prononcé.

«Il y a eu des tragédies avant, et cela n'a rien changé», dit M. Reiman, «on ne doit pas s'attendre à un quelconque examen de conscience, à de nouvelles attitudes ou de nouvelles lois. Le public va oublier jusqu'à la prochaine fusillade», dit-il.