Un an après, l'élimination d'Oussama ben Laden est devenue l'un des principaux arguments de Barack Obama lors de ses discours électoraux, le président démocrate espérant neutraliser ainsi toute accusation républicaine de faiblesse en matière de sécurité nationale.

Depuis qu'il a commencé à défendre son bilan en vue de la présidentielle du 6 novembre, M. Obama rappelle systématiquement le raid du commando qui, sous ses ordres, a abattu le maître d'Al-Qaïda le 2 mai 2011 dans son repaire d'Abbottabad au Pakistan.

Son équipe de campagne a même diffusé vendredi une vidéo où l'ancien président Bill Clinton salue chaleureusement la décision de son successeur malgré les risques politiques induits. Cette publicité rappelle aussi que le présidentiable républicain Mitt Romney s'était jadis opposé à l'idée de «remuer ciel et terre et de dépenser des milliards pour capturer une seule personne».

Lundi, M. Romney a assuré qu'il aurait bien donné l'ordre de lancer le raid. «Evidemment. Même (l'ancien président) Jimmy Carter aurait donné cet ordre», a-t-il lancé en riant.

M. Obama a riposté quelques heures plus tard lors d'une conférence de presse commune avec le Premier ministre japonais à la Maison-Blanche.

«En ce qui concerne mon rôle personnel et ce que d'autres auraient fait, je me contenterai de recommander à tout le monde de regarder les précédentes déclarations des gens sur la question de savoir s'il était convenable d'aller au Pakistan et de mettre Ben Laden hors d'état de nuire», a-t-il dit.

Et alors que le sénateur républicain John McCain a accusé M. Obama d'exploiter le raid pour raisons électorales, le président s'est défendu de toute «célébration excessive». «Je pense qu'il est tout à fait convenable d'utiliser ce moment pour un peu d'introspection, pour remercier ceux qui ont participé» à l'opération, a-t-il affirmé.

Les démocrates poussent leur avantage dans un dossier où ils ont souvent été vulnérables; Carter avait vu sa tentative de décrocher un second mandat torpillée en 1980 par la crise des otages en Iran, tandis que John Kerry, en 2004, avait souffert des attaques de l'équipe Bush sur sa supposée incompétence pour diriger un pays en guerre.

M. Romney a lui aussi tenté d'employer cette thématique, en accusant M. Obama de s'être «excusé au nom des Etats-Unis» à l'étranger et d'avoir «laissé tomber Israël» face à l'Iran.

M. Obama avait sèchement répondu en décembre: «demandez à Oussama ben Laden et aux 22 dirigeants d'Al-Qaïda sur 30 qui ont été mis hors d'état de nuire si je pratique l'apaisement».

Début février, dans un sondage du Washington Post, 56% des personnes interrogées disaient faire confiance à M. Obama face à la menace terroriste, contre 36% qui pensaient M. Romney plus compétent sur ce dossier.

«Toutes les données disponibles semblent montrer que le président Obama est jugé de façon favorable en matière de sécurité nationale. La mort de Ben Laden en est l'une des raisons, mais pas la seule», remarque Thomas Mann, de l'institut Brookings.

Il dit douter que les électeurs se déterminent sur cette seule problématique, «étant donné les circonstances économiques difficiles». Mais M. Obama «a réussi à neutraliser un sujet qui dans le passé, a surtout servi les républicains», selon lui.

Rick Nelson, du groupe de réflexion CSIS, juge lui aussi que la sécurité nationale ne sera pas le principal sujet de débat d'ici à novembre.

«Mais en fin de compte, le président a dû prendre la décision de lancer une mission très difficile et risquée pour aller à Abbottabad et tuer Ben Laden», dit-il.