Il y a quatre ans, à pareille date, l'entourage d'Hillary Clinton avait déterré la hache de guerre. Objectif: discréditer Barack Obama. Le sénateur de l'Illinois menaçait de remporter la course au leadership du Parti démocrate.

Le jeune politicien était charismatique, mais n'avait pas l'étoffe d'un président, soutenaient les alliés de Clinton. Il manquait à la fois d'expérience et de caractère.

«Si [Hillary] donnait une de ses couilles à Obama, ils en auraient chacun deux!», avait lancé l'un des plus redoutables stratèges du couple Clinton, James Carville.

En trois ans à la Maison-Blanche, Obama a réussi à faire la preuve qu'il a du cran pour ce qui est de la sécurité nationale. La mort d'Oussama ben Laden - un tonnerre d'applaudissements a salué la mention de l'événement par le président hier - rend difficile toute critique des républicains en la matière.

Mais lorsqu'il s'agit de politique intérieure, Obama demeure perçu avant tout comme l'homme du consensus. A-t-il le caractère nécessaire pour gagner les parties de bras de fer régulièrement menées contre les républicains à Washington? Sa base démocrate en doute encore.

Le sujet est revenu à l'ordre du jour le mois dernier. Il a été soulevé par l'acteur Matt Damon, jadis fervent partisan d'Obama.

«Un président d'un seul mandat, mais doté de couilles et qui aurait pu faire bouger des choses, aurait été bien mieux pour le pays, à long terme», a- t-il déclaré au magazine Elle.

Or, on l'a vu hier, Obama veut dorénavant prouver aux Américains qu'il n'est plus l'homme du compromis à tout prix.

Réclamant un deuxième mandat, il a dit vouloir s'entendre avec les républicains, mais du bout des lèvres. Il voulait surtout qu'on sache qu'il sera en mesure de tenir tête au parti de Mitt Romney et Newt Gingrich. À Wall Street. À l'industrie du pétrole. Et même à la Chine.

«Je vais travailler avec quiconque dans cette chambre. [...] Mais j'ai l'intention de combattre l'obstruction par l'action et je vais m'opposer à toute tentative de revenir aux politiques qui ont provoqué cette crise économique», a-t-il déclaré d'un ton ferme. Il agitait l'index droit tel un professeur qui met en garde des élèves dissipés.

Cet Obama version 2.0 a fait son apparition l'automne dernier. Les républicains refusaient alors obstinément de faire grimper les impôts des Américains les plus riches. Il les a critiqués comme il l'avait rarement fait depuis la course à la Maison-Blanche de 2008.

Il est revenu sur le sujet hier. «Si vous gagnez plus de 1 million de dollars par année, vous ne devriez pas payer moins de 30% d'impôts», a lancé le président. Le jour même où le républicain Mitt Romney, révélait qu'il avait été imposé à hauteur de 15,4% l'an dernier.

Le président, populiste à souhait, s'est présenté comme le sauveur de la classe moyenne. Son allocution - véritable plan de match de sa campagne - a servi de rampe de lancement pour des mesures visant à réduire les inégalités sur le sol américain et favoriser la création d'emplois.

Feu vert, donc, à l'interventionnisme du gouvernement, auquel sont allergiques les républicains.

Obama a même haussé le ton à l'égard des banques. Si elles prennent des risques avec l'argent de leurs clients, elles se frotteront à Richard Cordray, a-t-il prévenu.

Obama a nommé ce Robin des banques à la tête du nouveau Bureau de protection financière des consommateurs le 4 janvier dernier. Par décret. Il défiait ainsi les parlementaires républicains du Congrès. Ceux-ci bloquaient la nomination depuis plusieurs mois.

Les républicains ont vigoureusement dénoncé le discours sur l'état de l'Union. Indignés, ils accusent Obama d'alimenter une guerre des classes en voulant faire payer davantage les plus riches. Plusieurs démocrates, au contraire, se sentiront un peu plus rassurés. Leur candidat a prouvé qu'il est prêt à taper du poing sur la table et à montrer les crocs pour être réélu.