La défense de Bradley Manning a interrogé samedi des témoins sur les éléments à charge contre le jeune soldat accusé d'être la «taupe» de WikiLeaks et sur son homosexualité, au deuxième jour d'une audience marquée par des manifestations de soutien à l'accusé.

Les avocats du soldat, qui a eu 24 ans samedi, ont interrogé les témoins militaires sur de possibles «troubles d'identité sexuelle», dans une tentative manifeste de montrer que le soldat pouvait être en souffrance psychologique lors de son arrestation en Irak il y a 18 mois.

L'audience préliminaire, qui pourrait durer plusieurs jours, est destinée à déterminer si Bradley Manning est renvoyé devant une cour martiale, où il encourt la prison à vie.

Elle s'est ouverte samedi sur l'annonce du rejet en appel d'une requête de la défense mettant en doute la partialité de la procédure.

Le jeune homme, dont le visage juvénile a fait le tour du monde, est accusé notamment de «diffusion de renseignements militaires» et de «collusion avec l'ennemi».

Cet ancien analyste du renseignement en Irak aurait transmis au site WikiLeaks, entre novembre 2009 et mai 2010, des documents militaires américains sur les guerres en Irak et en Afghanistan, ainsi que 260 000 dépêches diplomatiques du département d'État.

Le premier témoin cité par l'accusation, Toni Graham, agent spéciale qui avait participé à l'enquête initiale, a admis avoir vu des informations ayant trait à des «troubles d'identité sexuelle».

«Je me souviens de plusieurs choses sur l'homosexualité et des troubles sexuels», a-t-elle dit, lors du contre-interrogatoire mené par un des avocats militaires de Manning, Matthew Kemkes. Mais «je n'étais pas concentrée sur cet aspect de sa vie», a-t-elle dit par téléphone depuis Hawaii.

L'avocat a estimé que ces éléments étaient «pertinents pour juger de l'état d'esprit» de son client.

La témoin a également reconnu que Manning avait un nombre «très limité» d'amis sur sa base en Irak.

Le deuxième témoin, Calder Robertson, l'agent spécial qui avait inspecté l'ordinateur portable personnel de Manning, a révélé que le soldat s'était dit «perturbé» dans un message instantané au pirate informatique Adrian Lamo, qui avait fini par le dénoncer.

M. Robertson était interrogé par l'autre avocat militaire de l'accusé, le capitaine Paul Bouchard, qui lui demandait s'il était tombé «sur des éléments montrant que Manning souffrait de troubles d'identité sexuelle», avait «essayé de créer un alter ego baptisé Breanna Manning» ou était «perturbé émotionnellement».

L'avocat a également tenté d'établir que d'autres soldats avaient accès aux équipements informatiques utilisés par Manning.

Devant les grilles de la base militaire de Fort Meade, environ 200 sympathisants de l'accusé se sont rassemblés brandissant des portraits du jeune soldat, lui ont chanté «joyeux anniversaire» et ont scandé «Libérez Bradley Manning» ou «Laissez sortir Bradley».

Manning est détenu «pour avoir dit la vérité», a déclaré l'un d'entre eux, Chris Hager, venu de Virginie (est). «Ils veulent faire de lui un exemple».

«Parfois il faut enfreindre la loi dans ce pays et commettre une désobéissance civile, Bradley est le héros de notre génération», a estimé un éditeur, Todd Fine.

«On a pu voir au premier jour d'audience que les choses seraient truquées», a dénoncé Kevin Zeese, membre du comité de pilotage du réseau de soutien de Bradley Manning.

Vendredi, l'avocat civil de Manning, David Coombs, avait d'emblée demandé que le magistrat chargé de l'enquête se récuse, estimant qu'il ne pouvait pas rester impartial en travaillant pour le ministère de la Justice qui mène une enquête sur WikiLeaks et son fondateur Julian Assange. Mais le recours a été rejeté en appel.