Un Saoudien accusé d'être le cerveau des attentats contre le navire américain USS Cole et le pétrolier français MV Limburg a été formellement mis en accusation mercredi à Guantanamo, le premier détenu renvoyé devant la justice militaire d'exception sous Obama.

Neuf ans après sa capture et une décennie après que les États-Unis ont autorisé les tribunaux militaires d'exception, Abd-Al-Rahim Al-Nachiri, 46 ans, est apparu pour la première fois en public dans une salle d'audience ultra-sécurisée.

Cheveux courts et barbe d'un ou deux jours, vêtu d'une combinaison blanche de prisonnier, il semblait détendu, levant la main en direction des familles des victimes et des journalistes, isolés derrière des vitres, et souriant à plusieurs reprises en répondant aux questions du juge.

Considéré comme un proche d'Oussama Ben Laden, qu'il aurait rencontré plusieurs fois selon l'acte d'accusation, il sera la première figure présumée d'Al-Qaïda à être jugée sous l'administration de Barack Obama.

C'est aussi le premier accusé à encourir la peine de mort devant un tribunal militaire d'exception sous l'actuel président.

Le procès débutera au plus tôt en novembre 2012 mais pourrait être retardé à la demande de la défense, a déclaré le juge, le colonel James Pohl. Entre temps, une audience est prévue en janvier.

Assis aux côtés de ses avocats, M. Nachiri n'était ni menotté, ni entravé à la cheville.

«J'ai choisi d'apparaître en uniforme de prisonnier», a-t-il ajouté. S'exprimant en arabe et traduit par un interprète, M. Nachiri a annoncé qu'il «assisterait à toutes les audiences».

Une adjointe du procureur, le commandant Andrea Lockhart, a égrené brièvement les chefs figurant sur l'acte d'accusation, qui n'a pas été lu dans son intégralité. Il est notamment accusé de complot en vue de commettre des actes de terrorisme, de meurtre en violation des lois de la guerre, d'acte de terrorisme et d'attentat contre des civils.

Ses avocats ont refusé de dire s'il plaiderait coupable ou non.

L'audience qui a duré quatre heures, a été pour la première fois retransmise en public aux États-Unis.

Le juge a accepté une requête de la défense protestant contre un contrôle de son courrier avec son client.

L'adjointe du procureur a admis que le courrier était «scanné» pour «protéger la sécurité nationale». Un responsable de la prison a raconté qu'il avait «saisi le casier du courrier juridique» de M. Nashiri en octobre «sur ordre» de son nouveau commandant.

Un des avocats, le commandant Stephen Reyes, a demandé «la protection de la confidentialité et des relations privilégiées» avec son client, qui plus est «dans un cas de peine de mort».

Son confrère, Richard Kammen, a soulevé la question de la légitimité de ce tribunal: il a demandé au juge s'il trouvait qu'«en torturant M. Nachiri, les États-Unis avaient perdu toute autorité pour demander la peine de mort».

M. Nachiri aurait subi des simulations de noyade dans une prison de la CIA, ce qu'avait admis le directeur de la CIA d'alors Michael Hayden.

«La route est longue», a déclaré après l'audience John Clodfelter, qui a perdu son fils sur l'USS Cole, mais il espère «un aboutissement».

«Je me mets à leur place», a déclaré Me Kammen, accusé de retarder les audiences, mais nous avons «besoin d'un procès juste».

C'est la première fois qu'un détenu est déféré devant la justice militaire d'exception depuis la prise de fonctions de Barack Obama. Depuis, trois procès se sont tenus à Guantanamo, mais les procédures avaient commencé sous George W. Bush.

M. Nachiri est poursuivi pour l'attentat contre le navire américain USS Cole qui avait fait 17 morts le 12 octobre 2000 au Yémen. Il est également renvoyé pour une tentative d'attentat quelques mois plus tôt contre un autre destroyer américain, l'USS Sullivans, à Aden, le 3 janvier 2000. Il sera en outre jugé pour avoir commandité l'attentat contre le pétrolier français MV Limburg, le 6 octobre 2002, dans lequel un marin bulgare avait péri.