Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, a déclaré dimanche que le département d'Etat, ainsi que les autorités d'autres pays, conduisaient des discussions préliminaires avec les talibans en Afghanistan.

«Je pense qu'il y a eu une volonté de discuter de la part d'un certain nombre de pays, y compris les Etats-Unis», a dit M. Gates, interrogé sur la chaîne de télévision CNN.

«Je dirais que ces contacts sont tout à fait préliminaires à ce stade», a ajouté le chef du Pentagone, qui a souligné qu'il était crucial de déterminer «qui représente vraiment les talibans», avant de s'engager dans des discussions avec quelqu'un qui prétend représenter le chef des talibans, le mollah Omar.

«Nous ne voulons pas nous retrouver à discuter à un moment donné avec quelqu'un qui est en fait un indépendant», a dit M. Gates.

Ces déclarations interviennent au lendemain de celles du président afghan Hamid Karzaï qui a affirmé que les Etats-Unis avaient entamé des négociations avec les talibans. «Des négociations avec les talibans ont commencé. Ces pourparlers se déroulent bien. Les forces étrangères, notamment les Etats-Unis, mènent eux-mêmes des négociations», a dit M. Karzaï lors d'une conférence à Kaboul.

Il s'agissait de la première confirmation officielle de pourparlers directs entre Washington et les talibans, chassés du pouvoir fin 2001 par une coalition militaire internationale dirigée par les Etats-Unis, mais dont la sanglante rébellion a gagné du terrain ces dernières années.

Le département d'Etat américain s'était refusé samedi à commenter les propos du président Karzaï, mais avait reconnu un «large éventail de contacts» pour soutenir les efforts de réconciliation.

Le gouvernement afghan tente de lancer un processus de réconciliation avec certains talibans pour mettre un terme à l'insurrection. Dans le cadre de ce processus, les Etats-Unis exigent que les talibans renoncent à la violence, rompent tout lien avec Al-Qaïda et respectent la Constitution afghane.

Récemment, M. Gates a affirmé que les 130 000 soldats étrangers en Afghanistan effectuaient des «progrès militaires substantiels sur le terrain», et il a encouragé l'Otan à ne pas se replier trop vite.

Dimanche sur CNN, il a insisté sur le maintien de forces significatives en Afghanistan en affirmant: «quelque soit la décision qu'il (le président Obama) prendra il restera un nombre significatif de soldats en Afghanistan».

«Je sais que les Américains sont fatigués de la guerre», a-t-il toutefois reconnu.

Al-Qaïda a été affaibli et pourrait se scinder

Robert Gates a aussi assuré que le réseau Al-Qaïda avait été sérieusement affaibli et qu'il pourrait se scinder en différents groupes régionaux maintenant que son chef Oussama Ben Laden avait été tué.

«La première chose est qu'ils ont été affaiblis de manière significative», a assuré M. Gates sur CNN, ajoutant que Ben Laden n'avait pas été le seul chef du réseau à avoir été tué récemment.

«Nous avons fait un important nombre de victimes parmi eux dernièrement et tout particulièrement au cours des deux dernières années», a-t-il souligné.

Al-Qaïda a annoncé jeudi la désignation d'Ayman al-Zawahiri, son numéro deux, pour succéder à Ben Laden, tué le 2 mai par un commando américain au Pakistan.

«La question est de savoir si Zawahiri, le nouveau dirigeant prenant la place de Ben Laden, est capable de maintenir ces groupes rassemblés dans une sorte de mouvement uni, ou si (Al-Qaïda) va commencer à éclater et ils vont devenir avant tout des groupes terroristes régionaux avec des cibles régionales. Cela nous ne le savons pas actuellement», a ajouté M. Gates.

Jeudi le secrétaire à la Défense avait assuré que le nouveau chef d'Al-Qaïda allait devoir faire face à un «certain nombre de défis» pour imposer son autorité à l'organisation, estimant qu'il n'avait pas le charisme de Ben Laden.

À l'instar du fondateur du réseau extrémiste, Ayman al-Zawahiri, 59 ans, s'est caché après les attentats du 11-Septembre et a été vu une dernière fois un mois après, en octobre 2001, à la frontière afghano-pakistanaise.

M. Gates, 67 ans, doit quitter ses fonctions d'ici la fin du mois, après quatre ans et demi passés au Pentagone. Il devrait être remplacé par l'actuel directeur de la CIA, Leon Panetta, bientôt 73 ans.

Par ailleurs, selon le New York Times de samedi les frappes de drones et les opérations secrètes contre Al-Qaïda en Afghanistan ont affaibli l'organisation et pourraient justifier un retrait plus rapide.

Le journal, qui cite de hauts responsables américains, indique que 20 des 30 plus importants responsables du réseau extrémiste dans la région ont été tués au cours de l'année passée