Le libertarien Ron Paul, considéré comme le «grand-père intellectuel» du mouvement Tea Party, a annoncé son intention de se porter candidat à l'élection présidentielle américaine, pour la troisième fois de sa carrière politique.

Le républicain âgé de 75 ans, représentant du Texas au Congrès, a annoncé mardi à Des Moines, dans l'Iowa, la mise sur pied d'un comité exploratoire, la première étape d'une course à la présidence. M. Paul a indiqué qu'il déciderait bientôt s'il entrera officiellement dans la course.

«Je serais très surpris si je ne prenais pas cette décision durant le mois de mai», a-t-il affirmé devant quelques dizaines de partisans réunis dans un hôtel près de l'aéroport de Des Moines.

En 2008, Ron Paul avait mené une campagne «d'outsider» pour obtenir la nomination républicaine, poussé par une base d'appuis restreinte mais fidèle, en particulier parmi les jeunes électeurs qui ont apprécié son soutien à la légalisation de la marijuana.

Quatre ans plus tard, au milieu d'une récession prolongée et d'une consternation généralisée face à la dette astronomique du pays, les observateurs politiques estiment que le principal message de Ron Paul -la réduction du déficit et de la taille du gouvernement- pourrait trouver un écho chez un grand nombre d'électeurs républicains dans les premiers États qui voteront aux primaires.

«Le dialogue a bougé en direction de Ron Paul», a estimé Cal Jilson, professeur de sciences politiques à l'Université Southern Methodist de Dallas.

«Au cours des 25 dernières années, il s'est constamment inquiété de la masse monétaire, des déficits, de la dette et de la Réserve fédérale. Il a été seul pendant très longtemps, mais maintenant, de nombreuses personnes au sein du Parti républicain et ailleurs sont inquiètes au sujet de ces questions», a ajouté M. Jilson.

Bruce Buchanan, professeur de sciences politiques à l'Université du Texas, abonde dans son sens.

«Il représente le type de prudence fiscale qui interpelle non seulement le Tea Party, mais aussi une base républicaine plus large en ce moment», a dit M. Buchanan.

«S'il obtient le même financement qu'il a eu la dernière fois, et le même type de soutien populaire, il pourrait faire une très bonne performance. Et si le terrain républicain finit par être clairsemé, et que des gens comme Sarah Palin ne se portent pas candidats, il pourrait rallier une grande partie de leurs partisans.»

Ron Paul, qui a été le candidat présidentiel du Parti libertarien en 1988, est arrivé quatrième à l'investiture républicaine de 2008, loin derrière John McCain, Mitt Romney et Mike Huckabee. Mais il a fracassé un record de collecte de fonds, attirant un nombre considérable de dons sur l'internet et rivalisant avec le triomphe similaire de Barack Obama durant la campagne présidentielle.

M. Paul est fortement opposé à la Réserve fédérale et à sa capacité d'imprimer de l'argent, et il a réussi à convaincre le Congrès d'adopter un projet de loi obligeant la «Fed» à ouvrir ses livres comptables.

Il veut éliminer l'impôt sur le revenu, abolir le département de l'Éducation et a voté contre la hausse du plafonnement de la dette.

Il s'est opposé à ce qu'il a qualifié d'«État providence» aux États-Unis, ainsi qu'au militarisme américain sur la scène internationale. Il estime que les États-Unis devraient cesser d'envoyer des troupes dans les conflits étrangers, comme celui qui se déroule en Libye.

Sa position antimilitariste pourrait déplaire à certains républicains, mais ses autres positions pourraient les attirer.

Il s'oppose au contrôle des armes à feu et pense même que les pilotes d'avion devraient être armés. Il est fortement pro-vie et dénonce l'avortement, mais ne pense pas que le gouvernement fédéral devrait légiférer sur la question.

Ron Paul s'oppose aussi au système de santé universel et critique la réforme du président Obama. Mais il se dit également prêt à consolider les programmes Medicare et Medicaid avec l'argent économisé en ramenant au pays les troupes basées dans des pays comme la Corée du Sud.

Sur d'autres questions, toutefois, la candidature de Ron Paul pourrait être difficile à vendre aux républicains.

Il a notamment estimé que la lutte contre les drogues était «un désastre total» qui devrait être abandonné et s'est dit favorable à la construction d'une mosquée près du lieu des attentats du 11 septembre 2001 à New York.

Lundi, un animateur de Fox News a questionné M. Paul au sujet de sa position sur la mosquée, en lui demandant: «N'êtes-vous pas préoccupé par les familles du 11-Septembre et ce qui est arrivé?»

«Cela signifie que vous blâmez la religion, et vous ne voulez pas blâmer la religion», a dit M. Paul. «Le principe, ici, est celui de la propriété privée. Nous ne devrions pas avoir un gouvernement qui construit des édifices et qui dit aux gens où construire. Ça devrait être une question de propriété privée.»

L'annonce de Ron Paul survient au lendemain de la décision-surprise du gouverneur du Mississippi, Haley Barbour, d'abandonner ses projets de se lancer dans la course à la Maison-Blanche.

M. Barbour, qui avait rallié des donateurs majeurs et de hauts stratèges républicains pour une éventuelle campagne, a déclaré lundi qu'il n'avait pas «le feu au ventre» nécessaire pour se lancer en campagne.

M. Barbour ne semble apparemment pas seul dans son apathie. Un récent sondage New York Times-CBS a montré que 56% des républicains n'étaient pas enthousiastes face aux potentiels candidats à l'investiture de leur parti.

L'entrée de Ron Paul dans la course met un terme aux spéculations voulant que son fils, le sénateur du Kentucky Rand Paul, envisage lui aussi de se lancer dans la mêlée. Le nouveau sénateur, également républicain, avait affirmé qu'il abandonnerait tout éventuel plan de campagne si son père entrait dans la course.