Dans une série de décisions lundi, le président américain Barack Obama a ordonné l'organisation de nouveaux procès militaires d'exception et encadré la détention illimitée de plus de 40 détenus de Guantanamo, renonçant à la plupart de ses engagements de campagne.

Ces nouvelles mesures inscrivent dans la durée l'action de la Maison-Blanche sur la base navale américaine située à Cuba.

De nouveaux longs procès pour crimes de guerre vont y être organisés et le réexamen des situations individuelles de ceux qui seront enfermés indéfiniment sans procès doit avoir lieu d'ici un an, puis tous les trois ans.

«Nous nous efforçons de poursuivre l'objectif du président de fermer la prison de Guantanamo, tout en établissant un cadre juridique cohérent avec notre sécurité et nos valeurs», a assuré un haut responsable de l'administration Obama sous couvert d'anonymat.

En mai 2009, M. Obama avait rappelé ne pas être contre le principe de tribunaux d'exception pour juger les suspects de terrorisme mais rejeter la manière dont ils avaient été conçus par son prédécesseur.

Le président démocrate «est toujours déterminé à fermer Guantanamo», a poursuivi le haut responsable, même si son administration a récemment reconnu que ce ne serait pas possible avant 2012.

Le gel des procès à Guantanamo avait été l'un des premiers gestes du nouveaux président américain, désireux de marquer une nette rupture avec les années Bush.

Mais le Congrès lui a depuis mis des bâtons dans les roues, interdisant le transfèrement de tout détenu sur le sol américain, même pour y être jugé. De fait, même ses adversaires politiques les plus farouches, comme le représentant républicain Peter King, ont salué les mesures adoptées jeudi estimant qu'«elles confirment la doctrine Bush selon laquelle notre gouvernement a le droit d'emprisonner de dangereux terroristes jusqu'à la fin de la guerre».

Concrètement, la Maison-Blanche va demander au secrétaire à la Défense Robert Gates de renvoyer de nouveaux accusés devant les tribunaux de Guantanamo réformés en 2009 par l'administration démocrate et le Congrès pour donner davantage de droits à la défense et interdire les déclarations faites sous la contrainte.

Ces nouveaux renvois devraient intervenir «très bientôt, c'est une question de semaines ou de jours», selon un autre haut responsable.

Parmi eux, le plus attendu est celui d'Abd-Al-Rahim Al-Nachiri, le principal suspect dans l'attentat du navire militaire américain USS Cole en 2000 au Yémen. L'avenir judiciaire des cinq hommes accusés d'avoir organisé les attentats du 11 Septembre 2001 est également en suspend.

Trois procès déjà très avancés lors de la prise de fonction de M. Obama se sont tenus à Guantanamo en 2010.

Pour l'administration, il s'agit d'un «outil important pour combattre le terrorisme international qui tombe sous notre juridiction tout en confirmant l'État de droit». Mais elle a répété lundi sa détermination à organiser certains procès devant des tribunaux de droit commun.

Parallèlement, un nouveau décret encadre la détention illimitée de plus de 40 des actuels 171 détenus de Guantanamo, car jugés trop dangereux pour être libérés mais contre lesquels les preuves sont insuffisantes ou non recevables.

Une audience devant un conseil réunissant des personnalités civiles et militaires permettra au détenu de présenter sa défense. L'accusation devra lui fournir en amont tous les éléments nécessaires à la préparation de son dossier.

A la suite de cette audience, un réexamen des documents sur un changement de situation sera organisé tous les six mois pendant trois ans, avant la tenue d'une nouvelle audience.

Une révision des efforts de l'administration pour rapatrier ou envoyer des détenus vers des pays tiers sera également pratiquée d'ici un an puis «au moins quatre ans plus tard», afin de vérifier que «continuer d'enfermer des prisonniers de guerre reste cohérent avec les intérêts des États-Unis».