Quelque 148 000 détenus dans 33 prisons conçues pour en accueillir 80 000: la Californie va tenter mardi de convaincre la Cour suprême des États-Unis de ne pas l'obliger à vider ses cellules surpeuplées où les conditions de vie sont «épouvantables».

Tenue par un jugement fédéral exigeant la libération de 46 000 prisonniers d'ici mi-2011, la Californie a déposé un dernier recours devant la plus haute juridiction des États-Unis qui examinera la question mardi et rendra sa décision probablement au printemps prochain.

«La plupart des prisons ne sont pas aux normes de sécurité et les conditions de vie y sont épouvantables», explique à l'AFP Craig Haney, professeur de psychologie à l'Université de Santa Cruz, spécialisé dans la vie carcérale.

«La santé mentale des prisonniers est encore aggravée par des niveaux de surpopulation sans précédent», poursuit le spécialiste, en critiquant la Californie qui, selon lui, «en refusant d'agir, a laissé les tribunaux prendre en mains la résolution du problème».

Il y a quelques années, les images de prisonniers dormant dans des couchettes sur trois niveaux installées dans des gymnases avaient attiré les foudres contre l'État le plus peuplé des États-Unis, à court de trésorerie. Mais depuis, l'État a travaillé à contenir la population carcérale, la faisant baisser de 175 000 à 148 000 détenus.

En août cependant, une émeute à la prison de Chino, à l'est de Los Angeles, a nécessité l'hospitalisation de 55 détenus tandis que 200 autres ont été légèrement blessés.

Et ce sont deux détenus assurant n'avoir pas accès aux soins médicaux et psychiatriques minimum que la Constitution leur garantit, qui ont déposé plainte l'année dernière, s'estimant victimes des mesures d'économies liées à la surpopulation.

Une formation exceptionnelle de trois juges fédéraux leur a donné raison en août 2009, évoquant des preuves «accablantes» du préjudice subi et ordonnant la libération de «25% de la population carcérale totale, d'ici deux ans».

Les autorités californiennes ont depuis refusé de se conformer à l'injonction.

«Libérer 40 000 détenus mettrait la sécurité en danger», affirme à l'AFP Oscar Hidalgo, porte-parole des autorités pénitentiaires de l'État. Il rappelle que la Californie a fait des efforts en envoyant 10 000 détenus dans des prisons privées de l'Arizona et du Mississippi et certifie que les tribunaux ne devraient pas dicter leur action aux autorités pénitentiaires.

«Nous avons vidé les gymnases avec les couchettes triples, il y a eu un apaisement en terme de surpopulation», a poursuivi M. Hidalgo.

Pour lui, le processus de réduction de la population carcérale doit se faire «dans le temps», sans «ultimatum judiciaire».

Témoin-expert dans l'affaire, Craig Hanes, qui a visité plusieurs prisons californiennes, juge que les autorités jouent la montre. «Des dizaines de milliers de vies sont en danger chaque jour dans ces prisons et pourtant les autorités pénitentiaires continuent de demander davantage de temps pour résoudre un problème qu'ils ont prouvé n'avoir ni l'envie ni les moyens de régler», déplore-t-il.

Le gouverneur sortant de Californie Arnold Schwarzenegger avait suggéré en janvier de transférer des milliers de prisonniers en situation irrégulière dans des prisons construites spécialement au Mexique. Mais selon M. Hidalgo, cette piste a depuis été abandonnée.