En campagne électorale en vue de devenir gouverneur de la Californie, Jerry Brown veut se présenter comme un homme ordinaire qui achète ses vestons à rabais, conduit une berline américaine et aime manger à la maison avec son épouse. Bref, il souhaite que les Californiens cessent de le voir comme le Jerry Brown d'il y a trente ans, surnommé le «gouverneur des étoiles».

Le démocrate septuagénaire, au coude-à-coude avec son opposante républicaine Meg Whitman, est déterminé à projeter une image loin de l'excentrique gouverneur californien qu'il était à la fin des années 1970.

Le Jerry Brown d'alors entretenait des histoires d'amour avec plusieurs actrices d'Hollywood, présentait des récitals de poésie en pleine campagne électorale et s'était rendu au Japon pour étudier dans un monastère bouddhiste.

M. Brown affronte la politicienne débutante Meg Whitman, une milliardaire qui a été à la tête du site de vente en ligne Ebay. Elle a dépensé plus de 121 millions $US de sa propre fortune pour tenter de s'attirer l'électorat de l'État américain le plus populeux..

Le politicien s'évertue à projeter l'image un homme d'État dont la seule ambition politique est d'aider la Californie aux prises avec un déficit budgétaire gigantesque.

Le politicien décoiffé dont les plus vieilles générations d'électeurs se souviennent a depuis longtemps passé l'âge habituel de la retraite. Il s'est marié il y a cinq ans et les cheveux qui lui restent sont coupés court. Brown projette une image bien différente de celle que les Californiens plus âgés ont connue.

Jerry Brown a toutefois tenté de présenter ses nombreuses années sur la scène publique comme un atout de taille, affirmant qu'il pouvait se servir de son expérience pour sortir la Californie de la récession. La crise économique y a eu de graves conséquences, laissant l'État avec un taux de chômage très élevé, un marché immobilier dévasté et une crise budgétaire si énorme que des enseignants ont dû être mis à pied et des centres de services sociaux fermés.

Le candidat démocrate a été procureur général de la Californie et maire d'Oakland, en plus de ses deux mandats comme gouverneur de l'État de 1975 à 1983. Il a aussi tenté sa chance dans les primaires démocrates pour la présidence américaine en 1976, en 1980 et en 1992.

«C'est la même personne que j'ai connu dans les années 70, mais ses expériences l'ont rendu plus sage», a indiqué l'ancien gouverneur Gray Davis, qui avait aussi été chef de cabinet de Jerry Brown. «Lors de son premier mandat, je crois qu'il se concentrait plus sur l'élaboration d'idées que sur leur résultat final. Je crois que ça a changé. Il veut remettre l'État sur la bonne voie».

De plus, Jerry Brown et maintenant marié. À l'âge de 67 ans, il a épousé sa conjointe de longue date, Ann Gust, une ancienne avocate chez Gap. Elle avait travaillé à ses côtés lors de son mandat comme procureur général et dans sa campagne au poste de gouverneur. Selon Jerry Brown lui-même, c'est son épouse qui ferait de lui un gouverneur plus sérieux que lors de ses deux mandats précédents. Il n'avait que 36 ans lorsqu'il a été élu pour la première fois, ce qui faisait de lui le deuxième plus jeune gouverneur de l'histoire de la Californie.

«J'ai maintenant une épouse. Je reviens à la maison chaque soir», s'est moqué M. Brown. «Je n'essaie pas de rester jusqu'à la fermeture des bars de Sacramento comme je le faisais quand j'étais gouverneur».

Mais même si Jerry Brown tente de se donner une image d'homme d'État, il reste un politicien non-conventionnel qui n'a pas peur de défier les journalistes qui lui posent des questions qu'il n'aime pas et n'arrive souvent pas à tenir sa langue.

Dans une récente entrevue avec l'Associated Press, Jerry Brown s'est rebiffé lorsqu'on lui a demandé pourquoi il souhaitait obtenir un nouveau mandat alors qu'il était plutôt à l'âge de prendre sa retraite.

«Je peux vous répéter exactement ce que j'ai déjà déclaré», s'est irrité le politicien. «Je peux inventer une raison différente, mais alors ce ne sera pas la vraie explication».

Lorsqu'un journaliste lui a demandé ce qu'il ferait différemment s'il était élu de nouveau, M. Brown s'est moqué en lui demandant si il savait seulement ce qu'il avait fait lors de ses premiers mandats.

Il a ensuite répondu aux questions, affirmant qu'il était plus sérieux, savait respecter les parlementaires et pouvait faire profiter la Californie de son expérience.

À plusieurs occasions cette année, M. Brown s'est retrouvé dans des situations périlleuses après s'être exprimé trop librement ou s'être écarté de son message politique.

L'été dernier, alors qu'il discutait avec une journaliste rencontrée sur son trajet de jogging, le politicien avait comparé la campagne de publicité de Meg Whitman à la propagande nazie, pensant que la conversation était personnelle.

Il s'est excusé après que le commentaire eut été publié sur un blogue de l'employeur de la journaliste et avait affirmé, en rigolant à moitié, que c'était la dernière fois qu'il discutait avec un représentant des médias pendant qu'il faisait ses exercices.