Le commandant des troupes de l'OTAN en Afghanistan est convoqué mercredi à la Maison-Blanche après des propos controversés sur l'exécutif américain, signe de tensions qui mettent à mal l'unité de l'Alliance au moment où elle vit une série noire meurtrière.

Cette convocation fait suite à une interview donnée par le général Stanley McChrystal à un magazine américain, dans laquelle il se moque notamment du vice-président Joe Biden.

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Le général McChrystal, selon un haut responsable à Washington, «devra s'expliquer devant le Pentagone et le commandant en chef», c'est-à-dire le président Barack Obama, «sur les propos qu'il a tenus sur ses collègues dans cet article».

L'article en question est une interview que le général McChrystal a accordée au magazine Rolling Stone, dans laquelle les tensions entre lui et la Maison-Blanche apparaissent en plein jour.

Selon les propos retranscrits dans l'article, le général s'y moque de Joe Biden, connu pour son scepticisme face à sa stratégie en Afghanistan. «Vous allez m'interroger sur Joe Biden?», demande-t-il en riant. «Qui est-ce?» «Biden», reprend un de ses conseillers.

Il égratigne également le président américain, revenant sur les frictions apparues entre l'armée et la Maison-Blanche à l'automne au moment où Barack Obama mûrissait sa décision concernant l'envoi de renforts réclamés par le général McChrystal.

En outre, le général dit s'être senti «trahi» par l'ambassadeur américain à Kaboul, Karl Eikenberry, l'an dernier lors d'un débat à la Maison-Blanche sur la stratégie en Afghanistan.

Excuses

Le général McChrystal a présenté ses excuses après la publication de l'article.

En pleine tourmente afghane, au moment où les forces de l'Alliance sont engagées dans deux offensives cruciales contre les talibans, dans les provinces du Helmand et de Kandahar (sud), l'ambassadeur mis en cause s'est néanmoins «engagé» à «travailler» avec le général McChrystal, selon l'ambassade américaine à Kaboul.

À Washington, le chef d'état-major interarmées des États-Unis, l'amiral Michael Mullen, s'est dit en revanche «profondément déçu» par les propos du général McChrystal, selon un porte-parole.

Ces dissensions éclatent au grand jour au moment où les forces internationales ambitionnent d'inverser le cours de la guerre en Afghanistan, avec la mise en place d'une nouvelle stratégie de contre-insurrection fin 2009.

Mais la convocation du général McChrystal, ainsi que le départ anticipé de Kaboul de l'envoyé spécial britannique, posent la question de l'unité au sein de la coalition et de l'adhésion à la stratégie voulue par Barack Obama.

Mardi en effet, le Foreign Office a annoncé le départ pour un «congé de longue durée» de l'émissaire spécial de la Grande-Bretagne en Afghanistan et au Pakistan, Sherard Cowper-Coles.

Selon le quotidien britannique The Guardian, Sir Sherard, l'un des diplomates britanniques les plus expérimentés, était en conflit avec les responsables américains et de l'OTAN à propos de la stratégie. Il estimait que la lutte armée contre les insurgés était vouée à l'échec et plaidait pour des pourparlers de paix avec les talibans.

Et sur le terrain, la série noire continue pour l'OTAN, avec la mort de cinq soldats américains, trois australiens, un canadien et un britannique, tués lundi dans un crash d'hélicoptère et des attaques dans le sud et l'est de l'Afghanistan.

Mardi, un soldat de l'OTAN a encore été tué dans le sud. L'alliance connaît ainsi l'un des mois les plus meurtriers pour ses troupes depuis la chute des talibans fin 2001.

Déjà 66 soldats des forces internationales ont péri en juin. Au total, 286 militaires étrangers sont morts dans le cadre des opérations militaires en Afghanistan depuis le début de l'année, selon un décompte établi par l'AFP à partir du site indépendant icasualties.org.