Les autorités américaines estiment que la fuite de brut dans le golfe du Mexique est deux fois plus importante que ce qu'on redoutait jusqu'ici, un nouveau coup dur pour BP qui devrait annoncer prochainement la suspension du paiement des dividendes à ses actionnaires.

Le groupe britannique, qui subit la colère croissante des responsables américains, devrait faire cette annonce dès la semaine prochaine, a rapporté vendredi la BBC.

Cette suspension ne devrait toutefois pas être annoncée avant une rencontre entre la direction du géant pétrolier et le président américain Barack Obama mercredi, précise la BBC.

40 000 barils de pétrole par jour

Jusqu'à 40 000 barils de pétrole -quelque 5260 tonnes- se déversent chaque jour dans le golfe du Mexique, selon l'estimation haute des experts mandatés par l'administration américaine pour évaluer l'ampleur de la fuite. L'estimation basse tourne autour de 20 000 barils.

La précédente estimation faisait état d'un écoulement allant de 12 000 à 19 000 barils par jour.

A titre de comparaison, en tenant compte de la fourchette haute, c'est comme si tous les quatre jours un Erika coulait. Le naufrage du pétrolier au large des côtes françaises en 1999, avait souillé 400 km de côtes et mazouté environ 150 000 oiseaux. Quelque 20 000 tonnes de brut s'en étaient échappées.

La plateforme Deepwater Horizon, qu'exploitait BP à 80 km des côtes américaines, a coulé il y a sept semaines provoquant la pire marée noire jamais vue aux Etats-Unis.

L'évaluation des autorités américaines a été réalisée avant la pose le 3 juin d'un entonnoir destiné à contenir le brut sortant du puits situé à 1500 m de profondeur.

BP récupère actuellement 15 000 barils de brut par jour grâce à cet entonnoir, et celui-ci est transporté à bord d'un navire en surface. La capacité maximale de récupération est de 28 000 barils par jour, mais le groupe espère la porter à entre 40 000 et 50 000 barils en envoyant de nouveaux navires sur place.

Des relations politiques polluées

Cette marée noire commence aussi à polluer les relations diplomatiques américano-britanniques. Barack Obama a violemment critiqué cette semaine le géant pétrolier, provoquant une levée de boucliers au Royaume-Uni.

Le nouveau Premier ministre britannique David Cameron, qui se vante de cultiver avec les Etats-Unis une «relation spéciale», a dû monter au créneau, indiquant qu'il évoquerait la marée noire lors d'un coup de téléphone à Barack Obama ce week-end.

Il s'est entretenu vendredi après-midi au téléphone avec le président de BP Carl-Henric Svanberg, lui disant qu'il était «inquiet» de la pollution et que BP devait rester «financièrement solide».

Les dividendes du groupe représentent une manne pour des millions de retraités britanniques actionnaires du groupe, qui a déjà perdu près de 50% de sa valeur en Bourse.

La Maison Blanche a confirmé vendredi que Barack Obama rencontrerait mercredi M. Svanberg, convoqué à une réunion sur la marée noire.

De son côté, l'Union européenne s'est dite prête à envoyer aux Etats-Unis de nouveaux équipements spécialisés dans la récupération de pétrole.

Sur place, les habitants des zones sinistrées, où doit se rendre M. Obama en début de semaine et pour la quatrième fois depuis le début de la catastrophe, s'alarment du moratoire sur la prospection en mer décrété par le président américain. Ils redoutent qu'une telle mesure n'enfonce davantage dans la crise l'économie locale, très dépendante du pétrole.