Six plants de marijuana poussent dans le placard de Shawn Wright. L'homme de 27 ans agit en toute légalité: il possède une carte remise par l'État de la Californie autorisant les gens malades à fumer du cannabis.

M. Wright est en pleine santé. Il profite simplement d'une application très libérale de la loi sur la marijuana médicale en Californie.

 

Un petit tour de passe-passe, répandu dans l'État, qui pourrait devenir désuet le 2 novembre prochain, quand les électeurs se prononceront sur la légalisation complète et la taxation de la marijuana - premier effort sérieux sur la question aux États-Unis.

M. Wright (nom fictif), graphiste qui habite Los Angeles, estime qu'il est grand temps que l'État cesse de «jouer à l'autruche» au sujet du cannabis.

«Je ne dis pas que le cannabis est bon pour la santé. Mais ce n'est pas pire que l'alcool. Je crois que le produit devrait être vendu et taxé. L'État a besoin de revenus.»

Les militants en faveur de la légalisation ont récolté plus de 680 000 signatures l'an dernier pour appuyer la tenue du vote. Maintenant, ils lancent une campagne de sensibilisation qui mise sur le thème de l'heure: la crise économique.

Dale Clare, porte-parole de la campagne «Contrôler et taxer le cannabis», note que l'État ferait des économies en cessant d'arrêter et de détenir les consommateurs de marijuana.

«Le cannabis est déjà la plante la plus lucrative cultivée en Californie. Nous voulons que l'État puisse toucher sa part.»

Une étude du Board of Equalization, instance chargée de percevoir les impôts en Californie, montre que l'État toucherait 1,4 milliard de dollars annuellement en taxes sur la marijuana. La Californie se dirige vers un déficit de 20 milliards en 2010.

La nouvelle loi autoriserait les personnes de 21 ans et plus à posséder une once de marijuana et à en faire la culture pour leur consommation personnelle. La consommation en public serait interdite. Le cannabis serait essentiellement traité comme l'alcool.

L'initiative prévoit un durcissement des peines pour les adultes qui vendraient de la marijuana aux mineurs, ou qui consommeraient la drogue près des écoles. La proposition offre aussi la possibilité à certaines villes de choisir d'interdire la vente de cannabis sur leur territoire.

Ouvrir la voie

La légalisation du cannabis nuirait aux groupes qui gèrent l'entrée massive des drogues aux États-Unis. Récemment, un représentant mexicain a confié au Wall Street Journal que la marijuana était responsable de 50% des revenus des groupes criminels, qui oscillent entre 30 et 40 milliards annuellement.

Plusieurs groupes représentant les forces de l'ordre comptent faire campagne contre la légalisation. Le groupe Parents contre les vendeurs de drogue s'oppose aussi à la légalisation de la marijuana. «Les déficits budgétaires ne justifient pas la légalisation du cannabis, note le groupe. L'avenir de nos enfants est plus important que cela», souligne le groupe.

Le dernier sondage sur la question, réalisé par la firme Pew en avril 2009, montre que 56% des Californiens sont en faveur de la légalisation.

C'est le cas du politologue conservateur John J. DiIulio fils, ex-directeur du programme de la foi mis sur pied par George W. Bush. Dans une récente lettre ouverte, M. DiIulio appelle les électeurs à légaliser le cannabis.

«L'an dernier, 800 000 personnes ont été arrêtées au pays pour possession simple de marijuana, ce qui a eu un impact à peu près nul sur la sécurité du public. Il n'y a aucune preuve convaincante voulant que le cannabis soit plus dangereux que l'alcool», conclut-il.