Alors que la facture des deux guerres menées par les États-Unis depuis près de 10 ans vient de franchir le cap des mille milliards de dollars, ce sont les États ruraux, le Vermont en tête, qui en paient le prix le plus élevé en termes de vies humaines.

Avec sa petite population de 621 000 habitants, le Vermont pleure la mort de 22 soldats en Irak depuis le début de l'invasion américaine, en mars 2003, soit un taux de 3,54 morts par tranche de 100 000 habitants.

 

Suivent dans cette catégorie le Montana (2,87), le Wyoming (2,57), le Nebraska (2,50) et le Dakota du Sud (2,46). Tous des États ruraux.

En chiffres absolus, ce sont la Californie (469), le Texas (409) et New York (186) qui ont perdu le plus de militaires, mais leur poids démographique fait en sorte que le nombre de morts par habitant est moins élevé.

Ces statistiques émanent d'une base de données que tient à jour l'agence Associated Press à partir des informations diffusées par le Pentagone. Ce constat quant aux États ruraux est récurrent depuis le début de la guerre en Irak.

Pourquoi le Vermont, État libéral et pacifique - dont l'un des sénateurs à Washington, Bernie Sanders, se qualifie de socialiste -, se retrouve-t-il avec un titre aussi peu enviable?

«Le Vermont est un État orienté vers la paix. Mais c'est tellement rural ici. Beaucoup de gens grandissent dans un environnement où il y a des armes», souligne Dorothy Halvorsen, mère du premier soldat vermontois tué en Irak, en entrevue à La Presse.

Le 2 avril 2003, deux semaines à peine après le début de l'invasion américaine, l'adjudant-chef Erik Halvorsen, 40 ans, est mort avec cinq autres camarades dans l'écrasement de l'hélicoptère Black Hawk qu'il pilotait près de la ville de Karbala. Depuis, 21 autres soldats du Vermont ont perdu la vie en Irak, contre seulement un en Afghanistan, toujours selon l'Associated Press.

Dorothy Halvorsen poursuit: «Les jeunes n'ont que 10 ans et vont à la chasse au chevreuil avec leurs pères. C'est un environnement propice pour les introduire à la vie militaire. Et souvent, il n'y a pas grand-chose à faire», dit cette résidante de Bennington, ville d'environ 15 000 habitants située tout au sud de l'État.

Mme Halvorsen n'est pas la seule à affirmer que l'armée recrute plus facilement dans les villes et les campagnes où il y a «peu de choses à faire». Dans le passé, de nombreux experts ont fait ce lien. Là où il y a peu d'emplois, là où le taux de chômage est élevé, le recrutement est plus facile.

D'autres jeunes moins fortunés s'enrôlent parce que la carrière militaire leur ouvre les portes du collège, là où ils peuvent apprendre un bon métier, décrocher un diplôme et, en fin de compte, gagner un bon salaire.

Le fils de Mme Halvorsen avait, lui, eu la chance d'étudier, mais dès sa sortie du collège, il a pris le chemin de l'armée de l'air. «Il voulait voler», dit sa mère simplement.

Enfin, les soldats vermontois ont été engagés dans des combats particulièrement violents en Irak. Six d'entre eux ont par exemple péri dans de violents affrontements à Ramadi.

Depuis le début de la guerre, des organismes favorisant la paix, des élus et des citoyens ont multiplié les actions pour soustraire le Vermont de la guerre en Irak. La plus récente mort d'un soldat de cet État en Irak remonte au 23 août 2009.

Au total, 4374 militaires américains ont perdu la vie dans ce pays. On en compte 4 depuis le début de l'année 2010.

 

Duchesne, AndréMille milliards

Le coût des deux guerres menées par les États-Unis a récemment franchi le cap du billion de dollars (1000 milliards) aux contribuables américains. C'est le constat réalisé par le Congressionnal Budget Office, organisme non partisan associé au Congrès des États-Unis. Dans son évaluation du budget américain 2010 rendue publique le 21 janvier, le bureau indique que le seuil du billion de dollars (1,075 billion pour être plus précis) a été franchi en décembre dernier lorsque les élus ont approuvé une extension de 130 milliards de dollars pour les opérations en Irak, en Afghanistan et les autres activités liées à la guerre.