L'administration Obama a annoncé mardi avoir décidé d'acquérir une prison de l'Illinois afin d'accueillir ceux des détenus de Guantanamo qui ne seront pas relâchés, sans avoir néanmoins encore obtenu le feu vert du Congrès pour leur venue sur le sol américain. 

Cette décision a été annoncée dans une lettre envoyée mardi au gouverneur de l'Illinois Pat Quinn et signée par la secrétaire d'État Hillary Clinton, le secrétaire à la Défense Robert Gates, la secrétaire à la Sécurité intérieure Janet Napolitano, le ministre de la Justice Eric Holder et le directeur du Renseignement américain, Dennis Blair. «Nous vous écrivons pour vous informer que le président a donné l'ordre au gouvernement fédéral, avec notre soutien unanime, de procéder à l'acquisition de l'établissement (pénitentiaire) de Thomson», une prison appartenant jusqu'ici à l'État de l'Illinois et située dans une zone rurale à 200 km environ à l'ouest de Chicago, écrivent les ministres dans cette lettre publiée par la Maison-Blanche.

Quasiment vide actuellement, cette prison peut accueillir jusqu'à 1 600 détenus. Son achat par l'État fédéral pourrait conduire à la création de plus de 3.000 emplois directs et indirects, une des raisons pour lesquelles les élus locaux se sont prononcés en sa faveur.

Sur 210 prisonniers actuellement détenus à Guantanamo, 116 sont susceptibles, selon M. Gates, d'être libérés ou extradés dans leur pays d'origine ou des pays tiers. Quelques dizaines devraient par ailleurs être traduits en justice.

Jugés trop dangereux pour être relâchés même si le gouvernement n'a pas assez de preuves contre eux pour organiser leur procès, les autres sont appelés à rester enfermés indéfiniment, en vertu de la loi de la guerre, avait expliqué M. Obama en mai.

À condition néanmoins que le Congrès lui en laisse la possibilité.

La représentation américaine a en effet jusqu'ici limité les marges de manoeuvre de l'administration dans son objectif de fermer Guantanamo, et la date butoir du 22 janvier 2010 pour cette fermeture a d'ailleurs été repoussée sine die. Les élus ont notamment interdit la venue sur le sol américain de détenus pour autre chose que leur procès.

Dans la lettre à M. Quinn, les ministres ont d'ailleurs indiqué que M. Obama «n'a aucune intention de libérer quelque prisonnier que ce soit aux États-Unis».

À terme, la prison de Thomson accueillera aussi bien des détenus fédéraux que d'anciens prisonniers de Guantanamo, selon la même source. Aucun contact ne sera possible entre les deux groupes, et l'établissement, construit en 2001, sera mis aux normes «Supermax», ou sécurité maximum.

«L'administration n'a pas réussi à expliquer en quoi le fait de transporter des terroristes dans un Guantanamo du Nord mettrait davantage les Américains en sécurité que de les garder hors de nos frontières», a estimé mardi le sénateur Mitch McConnell, chef de la minorité républicaine au Sénat.

«Il est temps que le Congrès (...) rejoigne le président pour effacer cette tache sur la réputation des États-Unis dans le monde», a pour sa part réagi la Campagne nationale pour fermer Guantanamo.

La décision de Barack Obama d'envisager une détention illimitée pour certains prisonniers est très critiquée par la gauche et les organisations de défense des droits de l'homme.

Le sort de chacun des détenus potentiellement concerné sera déterminé par des juges fédéraux, dans des procédures civiles, dont la décision sera souveraine. Ensuite, leur cas sera régulièrement réexaminé par l'administration.