La décision de juger à New York les accusés du 11-Septembre constitue une étape spectaculaire dans le processus de fermeture de la prison de Guantanamo, mais de nombreux obstacles subsistent avant la concrétisation de cette promesse du président Barack Obama.

Le ministre américain de la Justice, Eric Holder, en annonçant vendredi que les hommes accusés d'avoir organisé les pires attentats de l'histoire des États-Unis seraient jugés par un tribunal de droit commun, a remarqué qu'il s'agissait d'une avancée conforme aux engagements du président de fermer la prison d'ici à janvier 2010.

Mais l'annonce, qui comportait aussi le renvoi de cinq autres détenus devant des tribunaux militaires d'exception, laisse en suspens le sort des 205 autres prisonniers de l'enclave américaine à Cuba, héritage de la très controversée «guerre contre le terrorisme» du président George W. Bush.

«Il reste beaucoup à faire», avance Ken Gude, du groupe de réflexion Center for American Progress, plutôt marqué à gauche.

M. Holder a reconnu «ne pas être sûr que nous pourrons mettre un terme au processus (de fermeture) d'ici au 22 janvier, bien que nous y travaillions sans relâche».

La tâche est de fait herculéenne.

Entre autres, l'administration peine à trouver des pays qui voudraient accorder l'asile aux près de 70 détenus qui ont été blanchis de toute accusation mais ne peuvent pas être renvoyés dans leur pays d'origine car ils y seraient selon eux persécutés. Un émissaire, Daniel Fried, a été tout spécialement nommé à cet effet.

«Il s'agit d'un énorme problème diplomatique», constate Sarah Mendelson, directrice pour les droits de l'homme et la sécurité du Center for Strategic and International Studies, un centre de réflexion sans attache partisane.

«Dan Fried prend l'avion quasiment tous les jours pour essayer de trouver des pays qui accueilleraient ceux qui vont être libérés ou transférés» de Guantanamo, explique-t-elle.

Ces derniers mois, l'administration Obama a ainsi réussi à placer des Ouïghours chinois dans les archipels de Palau (Pacifique) et des Bermudes (Atlantique).

Mais pour compliquer les choses, certains Ouïghours demandent en justice à être admis sur le sol américain, ce à quoi s'opposent farouchement des élus au Congrès.

«Malheureusement, le Congrès a lié les mains (à l'exécutif) sur ce qui aurait été le plus facile: accepter un petit nombre de prisonniers aux États-Unis», selon M. Gude.

Parmi les autres casse-tête logistiques, le transfèrement des 97 Yéménites toujours prisonniers, soit 45% des effectifs de Guantanamo. Le gouvernement de Sanaa s'est dit prêt à en accepter et à juger les suspects de crimes, mais les États-Unis doutent de la fiabilité du système carcéral du pays, après de nombreuses évasions.

«Le problème yéménite sera le dernier à être résolu», prévoit M. Gude, pour qui l'espoir des États-Unis est de convaincre l'Arabie Saoudite voisine d'accueillir une partie de ces prisonniers dans un «programme de rééducation».

Un noyau dur de prisonniers, entre 50 et 95 individus, restera problématique: ceux qui resteront enfermés sans procès, avec un passage en revue régulier de leur situation. L'administration demeure muette sur leur lieu de détention à terme.

Malgré tous ces défis, M. Gude se dit persuadé que le problème pourrait être réglé en 2010, mais pas en janvier. «Je pense que si nous utilisons l'annonce d'aujourd'hui (vendredi) pour donner un élan, la fermeture pourrait être réalisée d'ici six mois», assure-t-il.