Trois pas en avant, deux pas en arrière: voilà comment progresse la réforme du système de santé des États-Unis promise par Barack Obama, qui pourrait devenir la réalisation la plus importante de sa présidence ou, comme l'a souhaité un sénateur républicain la semaine dernière, «son Waterloo».

Les progrès sont indéniables. La semaine dernière, la Chambre des représentants a présenté un plan détaillé qui vise à diminuer les coûts, à fournir de meilleurs soins et à améliorer le système d'assurance santé en élargissant notamment la couverture à 97% des Américains. Pour financer une partie de la réforme, dont le coût s'élèverait à plus de 1000 milliards de dollars en 10 ans, la Chambre prévoit un impôt supplémentaire de 1% à 5,4% pour les familles gagnant 350 000$ et plus. Une autre partie du financement proviendrait des économies réalisées grâce à la réforme.

Trois commissions de la Chambre ont déjà approuvé ce projet, qui devrait être soumis au vote de l'ensemble des représentants avant les vacances parlementaires d'août. La commission de la santé du Sénat a également donné son aval la semaine dernière à une autre version de réforme.

Les progrès ne s'arrêtent pas là. La réforme du système de santé jouit d'appuis importants à l'extérieur du gouvernement, non seulement parmi la population, mais également auprès des associations d'hôpitaux et de médecins, entre autres, qui s'étaient élevées contre les changements proposés par l'administration Clinton dans les années 90.

Nombreux obstacles

Mais les obstacles ne manquent pas. Malgré la promesse de Barack Obama de privilégier une approche bipartite dans le dossier de la santé, les républicains se sont unanimement opposés aux plans proposés par les démocrates de la Chambre et du Sénat. Ils ont notamment critiqué le coût de la réforme de même que la création d'une assurance maladie publique qui ait pour vocation de concurrencer les assureurs privés.

Selon les républicains, un tel système serait le début de la fin du système de santé privé aux États-Unis.

Des démocrates modérés et conservateurs ont également exprimé des réticences à l'égard de la réforme. Ils ont trouvé un allié de taille la semaine dernière en la personne de Douglas Elmendorf, directeur du Bureau du budget du Congrès, un organe législatif indépendant. Après avoir étudié les projets de loi de la Chambre et du Sénat, Elmendorf a conclu qu'aucun d'eux ne parviendrait à contenir la hausse des coûts de la santé publique, un des principaux objectifs de Barack Obama.

«Nous ne voyons pas le type de changements fondamentaux nécessaires pour réduire de manière significative la trajectoire des dépenses de santé fédéral», a déclaré Elmendorf.

Faisant allusion à cette conclusion, un groupe de six sénateurs, dont trois démocrates, a envoyé vendredi une lettre au chef de la majorité du Sénat, Harry Reid, lui demandant de reporter à plus tard un vote prévu pour le 27 juillet sur un projet de réforme.

Les républicains, dont le sénateur de Caroline-du-Sud Jim DeMint, ne demandent pas mieux, souhaitant vivement que ce vote n'ait pas lieu avant les vacances parlementaires. Dans leur esprit, cette période de relâche permettra aux Américains d'exprimer à leurs élus leur opposition à la réforme du système de santé proposée par les démocrates.

«Quand les sénateurs et les représentants reviendront en septembre, ils auront peur de voter contre le peuple américain», a déclaré le sénateur DeMint lors d'une téléconférence avec des militants conservateurs la semaine dernière.

«Cette question de la santé est le Jour J pour la liberté aux États-Unis, a-t-il ajouté. Si nous sommes capables de stopper Obama dans ce dossier, ce sera son Waterloo. Cela le brisera.»

Danger manifeste

De toute évidence, Barack Obama est conscient du danger auquel il fait face. Vendredi, lors d'un point de presse à la Maison-Blanche, il a insisté sur la nécessité de ne pas relâcher les efforts pour réformer le système de santé.

«Ce n'est pas le moment de ralentir, a-t-il dit. Au cours des dernières semaines, nous avons établi un consensus (sur la réforme) jamais vu dans ce pays. Nous devons maintenant franchir la ligne d'arrivée», a-t-il ajouté, tout en se disant «absolument convaincu» que la réforme sera adoptée cette année.

Peu après, la Maison-Blanche a créé un précédent en annonçant sur sa page Twitter que le président donnerait une conférence de presse télévisée mercredi à une heure de grande écoute. La réforme du système de santé sera évidemment au menu.