Le président Barack Obama a mis tout son poids jeudi derrière une réforme du système de santé, un grand projet censé offrir une couverture médicale à des dizaines de millions d'Américains, mais aussi une entreprise ardue et politiquement dangereuse.

C'est un projet sur lequel l'ancien président Bill Clinton s'est cassé les dents dans les années 90. George W. Bush s'est contenté de retouches.M. Obama, lui, veut faire adopter la réforme avant fin 2009, dès sa première année.

«Nous avons atteint un point où ne rien faire devant le coût du système de santé n'est plus possible. Le statu quo est intolérable», a-t-il dit à Green Bay (Wisconsin, nord), une localité exemplaire selon la Maison-Blanche de la maîtrise des dépenses pour des prestations adaptées.

«Nous avons le système de santé le plus onéreux au monde. Nous dépensons presque 50% de plus par personne pour la santé que le deuxième pays le plus cher. Le problème, c'est que nous ne nous portons pas mieux pour autant», a-t-il dit lors d'une réunion publique.

M. Obama compte tenir deux promesses: offrir une couverture aux 46 millions d'Américains qui en seraient dépourvus (environ 15% de la population); contribuer à réduire les déficits de moitié d'ici à 2013 en réduisant des dépenses de santé qui, au rythme actuel, absorberont dans dix ans un cinquième de la richesse nationale selon lui, pour des prestations en dégradation constante.

Mais il s'attaque à une hydre qui a participé à la défaite des amis démocrates de M. Clinton aux élections de 1994.

À nouveau, leurs adversaires républicains dénoncent une socialisation du système.

M. Obama a décidé de procéder différemment de M. Clinton. Il a engagé une vaste concertation pour tenter de rallier les parties prenantes (politiques, médecins, assurances etc.) en amont et s'en remet aux parlementaires pour rédiger la loi.

Pour sa part, il met son capital politique au service de cette entreprise.

Après Green Bay, il devait prendre la parole à Chicago (Illinois, nord) devant l'American Medical Association, la plus grande organisation de médecins.

Sans rien paraître imposer, il défend l'idée d'une assurance maladie publique, qui serait une grande nouveauté.

Le système de santé américain est pour une grande part entre des mains privées. Les Américains qui ont une assurance maladie la tiennent pour la plupart de leur employeur (privé ou public); d'autres sont couverts par un programme public spécifique selon des critères rigoureux (pour les personnes âgées, les handicapés, les anciens combattants ou des catégories de population aux faibles revenus). Mais il n'existe pas de système universel.

L'American Medical Association, grand bailleur de fonds électoraux, objecte à la création d'une assurance maladie publique qui, selon elle, risque de faire exploser les coûts alors que les États-Unis connaissent déjà des déficits records.

M. Obama a reconnu que la réforme «coûtera beaucoup d'argent à un moment où nous n'en avons pas en trop à dépenser». Mais il a promis qu'elle n'ajouterait pas aux déficits. Il a prôné la prévention, la chasse aux gaspillages et aux pratiques encourageant la multiplication des actes médicaux. Il a soutenu une possible augmentation des taxes, idée caressée par certains démocrates, et politiquement risquée.

Moins à gauche, d'autres démocrates, dont certains jouent leur réélection en 2010, pourraient être tentés de limiter la réforme dans ses ambitions.

Cependant, «cela va se produire», a dit la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, en parlant de la réforme, «nous avons dit au président que nous aurions un texte de loi d'ici à fin juillet».