«J'ose espérer qu'une sage Latino-Américaine pourvue d'une riche expérience arriverait la plupart du temps à une meilleure conclusion qu'un homme blanc qui n'a pas vécu cette vie-là.»

Ainsi parlait Sonia Sotomayor lors d'un discours prononcé en octobre 2001 devant la faculté de droit de l'Université de Californie à Berkeley. Ces jours-ci, la même déclaration lui vaut d'être qualifiée de raciste par plusieurs commentateurs conservateurs et quelques politiciens républicains.

 

Née dans une famille d'immigrants portoricains du Bronx, la magistrate de 54 ans a été choisie mardi par Barack Obama pour succéder à David Souter à la Cour suprême des États-Unis.

«Imaginez si un candidat au poste de juge avait dit: «Mon expérience en tant qu'homme blanc me rend meilleur qu'une Latino-Américaine». Le nouveau racisme n'est pas mieux que le vieux racisme», a écrit mercredi l'ancien président de la Chambre des représentants, Newt Gingrich, sur Twitter.

Et l'ex-parlementaire de Géorgie d'ajouter: «Un raciste blanc serait forcé à retirer sa candidature. Une Latino-Américaine raciste devrait également se retirer.»

L'animateur de radio Rush Limbaugh a pour sa part sonné la charge chez les commentateurs conservateurs en traitant la juge hispanophone de «raciste inversée».

Les défenseurs de Sonia Sotomayor ont reproché à ses critiques d'avoir extrait la déclaration de la magistrate de son contexte. Ils ont fait valoir que celle-ci parlait des cas de discrimination fondée sur le sexe ou la race que doivent trancher les juges.

Quoi qu'il en soit, les politiciens républicains n'ont pas tous crié au racisme. «Non, je ne suis pas d'accord avec ça», a déclaré le sénateur républicain de l'Utah Orrin Hatch lors d'une entrevue sur CNN, tout en qualifiant de «très troublants» certains commentaires de la juge Sotomayor. Plusieurs organisations conservatrices ont préféré les expressions «radicale» ou «activiste» pour décrire la magistrate de New York. Elles l'ont notamment critiquée pour avoir déjà dit que «la Cour d'appel est le lieu où se fait la politique».

Cette insistance sur certains commentaires de Sonia Sotomayor donne à penser que ses critiques conservateurs n'ont pas trouvé grand-chose à lui reprocher parmi les nombreuses décisions qu'elle a rendues en tant que juge. Elle devra quand même expliquer sa prise de position en faveur de la Ville de New Haven, qui avait refusé de promouvoir 18 pompiers blancs à la suite d'un examen qu'aucun candidat noir n'avait pu passer avec succès.

La magistrate comparaîtra dans les prochaines semaines devant la commission judiciaire du Sénat, qui doit approuver ou rejeter sa nomination à la Cour suprême. D'ici le vote final de confirmation par l'ensemble des sénateurs, les républicains devront décider de leur stratégie. Leur défi est délicat: satisfaire la base conservatrice du parti, qui s'oppose au choix du président Obama, sans s'aliéner l'électorat hispanophone, dont le poids politique s'accroît.

En attendant, le sénateur républicain de Floride Mel Martinez a invité ses collègues à être «justes» à l'égard de la juge Sotomayor.

«En tant qu'Américain d'origine hispanique, je tire une grande fierté de la nomination d'une personne d'origine hispanique à la Cour suprême», a-t-il déclaré mardi.