Le président Barack Obama a annoncé vendredi le maintien des tribunaux militaires d'exception de George W. Bush pour juger certains suspects de terrorisme emprisonnés à Guantanamo, tout en promettant de réformer un système qu'il a réprouvé par le passé.

M. Obama a annoncé à la fois sa décision de ranimer ces tribunaux, qui s'appliquera au premier chef aux cinq hommes accusés d'avoir organisé les attentats du 11 septembre, et un changement de leurs règles de fonctionnement.

Il s'agit de renforcer les droits des suspects, à commencer par l'interdiction des preuves obtenues sous la torture ou la contrainte.

Ces réformes contribueront à rétablir les tribunaux militaires «dans leur rôle de forum servant légitimement à rendre la justice, tout en les plaçant sous l'autorité de la loi», a-t-il dit dans un communiqué.

L'annonce d'une modification des règles n'a pas empêché l'indignation de la gauche et des organisations de défense des libertés, de plus en plus inquiets quant à la détermination de M. Obama à rompre avec les pratiques décriées de son prédécesseur.

L'un des premiers actes de M. Obama deux jours après son investiture a été de demander la suspension pour quatre mois des activités des tribunaux, ou «commissions militaires», créés en 2006 pour juger les suspects de terrorisme, le temps d'examiner que faire des prisonniers.

Les conseillers de M. Obama sont donc parvenus à la conclusion que juger tous les suspects devant des tribunaux de droit commun n'était pas faisable.

Plusieurs détenus ont été soumis à des traitements dénoncés comme des actes de torture. Parmi eux, Khaled Cheikh Mohammed, cerveau auto-revendiqué du 11 septembre, a subi la simulation de noyade 183 fois en un mois, selon des documents récemment publiés.

Concrètement, l'administration va demander une prolongation de la suspension des neuf procédures actuellement en souffrance devant les tribunaux, le temps de réformer les règles.

Selon les nouvelles règles, les déclarations obtenues des prisonniers par des méthodes d'interrogatoire «cruelles, inhumaines ou dégradantes ne seront plus admises comme preuves», a indiqué M. Obama.

Le recours aux témoignages que leurs auteurs, pour différentes raisons, ne pourraient venir confirmer à la barre sera en outre limité et l'accusé disposera de plus de liberté dans le choix de son avocat, a-t-il dit.

Pendant sa campagne, M. Obama avait estimé que le système d'exception constituait une «échec énorme».

M. Obama a cependant rappelé vendredi que les commissions militaires ont «une longue tradition aux Etats-Unis» et qu'elles sont le lieu «approprié pour juger les ennemis qui violent les lois de la guerre, à condition qu'elles soient conçues et administrées comme il convient».

C'est à la loi régissant le système sous M. Bush qu'il s'est «fermement opposé», dit-il. Il a rappelé que ce système n'avait permis de juger que trois suspects depuis 2001.

C'est un argument auquel souscrivent les organisations de défense des libertés pour affirmer l'inefficacité pure et simple du système.

«Le président ferait bien de se rappeler les mots désormais tristement célèbres qu'il a prononcés durant sa campagne présidentielle: on ne met pas de rouge à lèvres à un cochon», s'est ému Anthony Romero pour l'organisation ACLU.