L'ancien garde de camp nazi John Demjanjuk a été déclaré expulsable vendredi par une cour d'appel américaine qui a rejeté sa demande de suspension d'expulsion vers l'Allemagne, au motif que son état de santé n'aurait pas permis le voyage, a indiqué le département de la Justice.

«Sur la base des informations médicales données à la cour et sachant les conditions dans lesquelles il sera transporté --un appareil équipé d'un service d'ambulance aérien avec personnel médical à bord-- le tribunal ne peut pas conclure qu'un départ vers l'Allemagne risque de causer des dommages irréparables (sur sa santé) au point de justifier une suspension de la procédure», écrit la cour d'appel fédérale basée à Cincinnati (Ohio, nord).

Depuis bientôt deux mois de feuilleton judiciaire, l'ancien auxiliaire de Sobibor pendant la Deuxième guerre mondiale s'est battu pour échapper à son expulsion des Etats-Unis vers l'Allemagne.

Berlin a délivré le 11 mars un mandat d'arrêt à l'encontre de John Demjanjuk accusé d'avoir aider à l'extermination de 29.000 juifs dans les camps de la mort.

Sa famille et son avocat ont affirmé qu'une expulsion de «ce vieil homme malade» de 89 ans serait «inhumaine» et assimilable à de la torture. Il est installé aux Etats-Unis avec sa famille depuis 1952.

Le ministère de la Justice américain a indiqué vendredi qu'il continuerait donc à oeuvrer pour procéder au transport de M. Demjanjuk vers l'Allemagne sans pouvoir donner de date précise.

Interrogé par l'AFP, son fils, John Demjanjuk Junior, a indiqué que la famille «étudiait actuellement toutes les possibilités juridiques, dont un appel devant la Cour suprême».

Le dossier ne comporte aucune preuve de l'implication de John Demjanjuk dans le moindre meurtre, assure son fils, qui présente son père comme «un prisonnier de guerre ukrainien qui a failli être tué au combat par les nazis qui considéraient les Ukrainiens comme des sous-hommes, de même que tout ce qui n'était pas allemand».

«Ils l'ont presque tué et ils tentent à présent d'achever leur forfait», a lancé John Demjanjuk Junior.

Mi-avril, les autorités avaient emmené John Demjanjuk de son domicile de la banlieue de Cleveland (Ohio) pour procéder à son expulsion qui a été suspendue in extremis par un référé de la cour d'appel de Cincinnati.

Le ministère a ensuite demandé à la justice de poursuivre la procédure d'expulsion, affirmant que l'octogénaire était en mesure de voyager.

Le ministère de la Justice américain s'est appuyé sur un rapport confidentiel d'un médecin militaire spécialiste du transport aérien, le capitaine Carlos Quinoes, certifiant que M. Demjanjuk avait été autorisé à prendre l'avion après un examen médical.

Le médecin a aussi fourni à la cour quatre vidéos le montrant sortir de sa voiture et entrer dans les bureaux des services médicaux.

Né en Ukraine en 1920, John (Yvan) Demjanjuk, soldat dans l'Armée rouge, avait été capturé par les nazis au printemps 1942.

Il a ensuite été formé au camp de Treblinka, en Pologne, et a servi deux ans dans les camps de Sobibor et Majdanek, en Pologne, et Flossenburg, en Bavière.

M. Demjanjuk a toujours affirmé avoir été forcé à travailler pour les nazis et avoir été confondu par des survivants avec d'autres gardes cruels, notamment «Ivan le Terrible». Il s'est installé aux Etats-Unis en 1952 avec sa famille.

Condamné à mort en Israël en 1988, il a toutefois été acquitté par la Cour suprême israélienne en raison de doutes sur son identité.