Après la publication jeudi de notes internes révélant les méthodes d'interrogatoire de l'ère Bush, l'administration Obama se retrouve sous le feu croisé de critiques de la part d'associations de droits de l'homme et de conservateurs mécontents.

«Nous n'utiliserons plus ces techniques à l'avenir. Mais nous défendrons absolument ceux qui se sont conformés à ces notes internes et ces directives», a expliqué Dennis Blair, le directeur du renseignement américain (DNI) de Barack Obama, dans un communiqué.

Le président lui-même a affirmé que les agents de la CIA chargés des interrogatoires «ont fait leur devoir».

Il n'en fallait pas plus pour irriter les associations de droits de l'homme qui réclament des comptes depuis des mois.

«Le département de la Justice semble offrir un sauf conduit de sortie de prison à des individus qui, selon le ministre de la Justice Eric Holder lui-même, étaient impliqués dans des actes de torture», s'insurge le directeur exécutif d'Amnesty International Larry Cox. «Les lois n'ont de sens que si elles sont appliquées. Les Etats-Unis ont des lois qui interdisent la torture», dit-il.

L'un des porte-parole de l'organisation, Daniel Gorevan, a assuré à l'AFP qu'Amnesty espère toujours des poursuites.

Le Center for Constitutionnal Rights (CCR) estime que «c'est une des plus grandes déceptions de cette administration qui semble réticente à faire respecter la loi là où des crimes ont été commis par d'anciens responsables».

Le CCR précise que ce sont les «responsables de haut niveau qui ont conçu, justifié et ordonné le programme de torture (...) qui doivent être traduits en justice».

Par ailleurs, l'Association américaine de défense des libertés publiques (ACLU) a qualifié d'«intenable» la position du président Obama sur l'absence de poursuites. «Appliquer les lois du pays ne devrait pas être une décision politique», ajoute l'ACLU dans un communiqué.

De leur côté, les anciens du camp Bush n'épargnent pas M. Obama, mais pour des raisons bien différentes.

Deux hauts responsables de l'ancienne administration ont dénoncé vendredi la publication des notes internes, affirmant qu'elle informe les terroristes et affaiblit l'espionnage américain.

«La publication de ces notes n'était pas nécessaire en termes de droit et n'est pas saine en termes de politique», affirment l'ancien directeur de la CIA, le général Michael Hayden, et l'ancien ministre de la justice Michael Musakey dans un long éditorial du Wall Street Journal.

«Avec la révélation de ces techniques, les terroristes sont assurés d'être informés des limites absolues à l'intérieur desquelles les Etats-Unis agissent pour obtenir des informations. Ils peuvent donc adapter leur entraînement et affaiblir l'efficacité de ces techniques», ajoutent-ils.

«Nul besoin d'un analyste du renseignement pour se rendre compte que livrer à Al-Qaïda les techniques exactes utilisées lors d'un interrogatoire est une bien mauvaise idée», a estimé pour sa part le sénateur républicain Christopher Bond, de la commission du Renseignement.

Quatre notes internes secrètes rédigées pour la CIA par des avocats du département de la Justice en 2002 et 2005, détaillant les techniques d'interrogatoire utilisées pendant l'ère de George W. Bush, ont été publiés jeudi conformément à ce qu'avait promis la nouvelle administration qui a interdit ces pratiques.

Ces techniques d'interrogatoire comprenaient coups, privation de sommeil, exposition à des températures extrêmes, maintien dans des positions inconfortables ou encore recours à des insectes pour impressionner les prisonniers.