Le président Barack Obama reconnaît, dans une entrevue publiée samedi dans The New York Times, que les États-Unis ne sont pas sur la voie de la victoire en Afghanistan et ouvre la porte à un processus de réconciliation selon lequel l'armée américaine tendrait la main à des talibans modérés, comme elle l'a fait avec des milices sunnites en Irak.

Ces propos tenus vendredi à bord de l'Air Force One ne sont pas sans faire écho à la déclaration de Stephen Harper sur les ondes de CNN la semaine dernière, qui a estimé impossible de remporter la victoire en Afghanistan.

M. Obama rappelle que l'armée a réussi à séparer des insurgés irakiens de membres plus radicaux d'Al-Qaeda en Mésopotamie, une stratégie responsable pour plusieurs, au même titre que l'augmentation des troupes américaines, du revirement de situation en Irak au cours des deux dernières années. «Il pourrait y avoir des possibilités comparables en Afghanistan et dans la région pakistanaise», révèle-t-il, non sans admettre que les solutions en Afghanistan seront compliquées.

Désireux de réviser l'approche de la Maison-Blanche dans la région, le président Obama souligne qu'une réconciliation pourrait s'avérer une initiative importante, comme celle employée par le général David H. Petraeus en Irak.

«Le général Petraeus soutiendrait qu'une partie du succès en Irak est attribuable au fait d'avoir tendu la main à des personnes que nous qualifierions de fondamentalistes islamiques, mais qui étaient prêtes à travailler avec nous, car elles avaient été complètement aliénées par les tactiques d'Al-Qaeda en Irak», affirme le président.

En même temps, il reconnaît que cette approche pourrait ne pas connaître le même succès. «La situation en Afghanistan est certes plus complexe, souligne-t-il. La région est moins gouvernée et les tribus sont farouchement indépendantes. Ces tribus sont multiples et agissent parfois sans se comprendre, et démêler tout cela sera un défi beaucoup grand.» Ainsi, le projet de tisser des liens avec certains talibans ne s'annonce pas comme une mince tâche: les responsables devraient déterminer lesquels pourraient être courtisés, dans un pays anarchique aux prises avec des groupes d'insurgés ennemis.

La Maison-Blanche a en outre critiqué le gouvernement pakistanais pour son propre accord de réconciliation avec les leaders talibans dans la vallée de Swat, où la charia a été imposée et où les figures radicales dominent.

Islamabad a tenté de rassurer Washington, plaisant que cette entente n'était pas une capitulation, mais plutôt une tentative de semer la discorde entre les leaders talibans radicaux et les islamistes de la région.

Capture de terroristes

Au cours de l'entrevue, Barack Obama a laissé ouverte la possibilité pour les agents américains de capturer des présumés terroristes à l'étranger sans la coopération du pays dans lequel ils auraient été trouvés. «Il pourrait y avoir des situations - et je mets l'accent sur "pourrait", car nous n'avons rien déterminé encore - où un agent d'Al-Qaeda qui ne fait pas surface souvent et que nous estimons être une personne très dangereuse se manifeste dans un pays du tiers-monde avec lequel nous n'avons pas de relation d'extradition ou qui refuserait d'engager des poursuites, explique-t-il. Je crois que nous devons encore réfléchir sur la façon de faire face à un tel scénario.» En référence à la fermeture de Guantánamo, Barack Obama signale également que les libéraux les plus à gauche qui souhaitent un revirement complet de la politique de détention de George Bush pourraient être déçus. Le président affirme qu'au moment où il est entré en fonction, l'administration Bush avait déjà pris des « mesures pour corriger certaines politiques et procédures après celles des premières années » suivant les attaques du 11 septembre 2001.