Le parti républicain américain, privé de figure de proue depuis l'élection de Barack Obama, tente de se reconstruire autour d'un animateur radio, l'ultra-conservateur Rush Limbaugh, dont les attaques outrancières font les choux gras du camp démocrate.

Le très controversé Rush Limbaugh, 58 ans, dont l'émission attire près de 20 millions d'auditeurs par semaine, répète à l'envi qu'il souhaite l'échec du président Obama.

Dès l'investiture du nouveau président, en pleine Obamania, il déclarait: «J'espère qu'il échouera». Un voeu que le tribun au physique imposant a réaffirmé dans un discours très applaudi devant la Conférence des conservateurs ce week-end. Et mercredi, il jugeait «patriotique» de vouloir l'échec d'un président qui défend un programme «socialiste».

Alors que Barack Obama a promis de gouverner au-dessus des clivages partisans, les républicains se retrouvent écartelés entre l'espoir que suscite l'animateur ultraconservateur dans un horizon sans autre véritable dirigeant charismatique et la tentation de dénoncer sa rhétorique agressive à l'égard d'un président au faîte de sa popularité.

Les rares républicains qui ont osé critiquer Limbaugh ont fini par s'excuser.

Le nouveau président du parti, Michael Steele, premier Noir à occuper ce poste, avait accusé Limbaugh d'user d'un vocabulaire «hideux» et «incendiaire» dans ses émissions.

Fustigé en retour par Limbaugh qui l'a exhorté à «commencer à faire le travail pour lequel il a été élu», Steele s'est confondu en excuses. «Il n'y avait aucune intention de ma part de diminuer sa voix ou son rôle dirigeant», a-t-il déclaré, avant de dire son «profond respect» pour Limbaugh.

«Quand un républicain le critique, il doit faire marche arrière, s'excuser et dire que c'est un malentendu», a ironisé Rahm Emanuel, le secrétaire général de la Maison Blanche.

Les démocrates présentent l'animateur et ses attaques désormais quotidiennes contre Barack Obama comme le vrai visage du républicanisme que les électeurs ont rejeté à la présidentielle de novembre.

«Il est la voix, la force intellectuelle et l'énergie du parti républicain», a estimé M. Emanuel.

«Rush Limbaugh est devenu leur dirigeant», a également affirmé David Plouffe, proche conseiller du président Obama.

Le porte-parole de la Maison Blanche Robert Gibbs a même appelé la presse à «demander aux républicains s'ils cautionnent le souhait de M. Limbaugh de voir échouer les idées économiques du président».

«Pour beaucoup d'Américains, avides de coopération et de direction politique, c'est comme un crissement d'ongles sur un tableau noir», selon M. Plouffe.

Quand le site Politico a estimé que l'offensive anti-Limbaugh était en fait orchestrée par la Maison Blanche, l'animateur le mieux payé d'Amérique a accusé les démocrates «assoiffés de pouvoir» de «festoyer sur leur propre arrogance».

Mais les attaques verbales de l'animateur radio pourraient bien se retourner contre son propre parti. «C'est une politique d'isolement au moment où les sondages montrent que les Américains veulent des solutions et la fin de la rhétorique politicienne», selon John Zogby, directeur de l'institut de sondages éponyme.

Si Limbaugh a démenti nourrir une quelconque ambition politique, des sites ont fleuri en vue de la prochaine élection présidentielle, comme RushForPresident.com du nom de l'animateur vedette.