Dans l'histoire, les accointances et divergences entre présidents américains et premiers ministres canadiens ont eu un certain impact les relations entre les deux pays.

Un autre chapitre des relations canado-américain s'ouvrira jeudi avec la visite du président américain Barack Obama à son homologue canadien Stephen Harper.

Les deux hommes s'entendront-ils ou leur idéologie ne leur permettra pas de se rapprocher ? Chose certaine, le menu de cette rencontre de travail sera substantiel : avenir du Canada en Afghanistan, règles protectionnistes dans les accords commerciaux, changements climatiques, rapatriement d'Omar Khadr au pays... Sans oublier l'éternelle question de la frontière.
En cette journée de la Saint-Valentin, nous vous invitons à réunir six couples présidents-premiers ministres dont les relations ont été tantôt amicales, tantôt cordiales et parfois même, un mal nécessaire.

HARRY TRUMAN-WILLIAM LYON MACKENZIE KING
Une visite d'amitié et de courtoisie. Une visite qui s'inscrit dans le cadre de la politique étrangère américaine de solidifier ses liens avec ses voisins, le Canada et le Mexique. C'est dans cet esprit que le président américain Harry S. Truman séjourne au Canada les 10, 11 et 12 juin 1947.
Les relations avec le premier ministre canadien William Lyon Mackenzie King semblent alors être au beau fixe. Détendu, Truman va de réceptions en conférences le sourire aux lèvres. Il lance même des fleurs au Québec qui, dit-il, insuffle la vitalité et l'esprit de la France au Canada.
Truman s'adresse également aux parlementaires canadiens et incite le pays à joindre une coalition mondiale pour la reconstruction autour du monde à la suite de la Seconde Guerre mondiale.
 
JOHN F. KENNEDY-JOHN DIEFENBAKER
Le très démocrate John F. Kennedy détestait son vis-à-vis canadien qui le lui rendait bien. À l'occasion de sa seule visite en territoire canadien, en mai 1961, Kennedy avait oublié un carnet de notes dans la salle où il avait eu un entretien officiel avec Diefenbaker. Or, les lettres SOB inscrites dans le carnet laissaient entendre que dans l'esprit de Kennedy, Diefenbaker était un fils de pute (Son of a Bitch). Le premier ministre canadien avait menacé les Américains de rendre la note publique s'ils ne faisaient pas de concessions sur les questions de défense aérienne dans le Grand Nord. En réponse, Kennedy avait philosophé qu'il ne pouvait savoir que Diefenbaker était un SOB parce qu'il ne savait pas encore, au moment de leur rencontre, qu'il en était un ! Devant la Chambre des Communes, Kennedy avait pressé le Canada à joindre les rangs de l'Organisation des États Américains. Un geste qui avait mis en furie Diefenbaker qui, en privé, avait dit non à cette requête américaine.
 
RICHARD M. NIXON-PIERRE E. TRUDEAU
Peu avant de le rencontrer dans le bureau ovale, Richard M. Nixon avait traité Pierre Elliott Trudeau de fils de pute (décidément...).
À l'occasion d'un discours devant le National Press Club en 1969, Trudeau avait lancé aux Américains cette phrase célèbre : « Être votre voisin, c'est comme dormir avec un éléphant ; quelque douce et placide que soit la bête, on subit chacun de ses mouvements et de ses grognements. »
En visite à Ottawa en avril 1972, Nixon menace de mettre fin au traitement de faveur accordé au Canada en matière économique et d'appliquer les mêmes mesures protectionnistes que celles existant avec le reste du monde dans les accords commerciaux.
« Le moment est venu de reconnaître que nous avons des identités très distinctes, que des divergences importantes nous séparent et qu'il n'est dans l'intérêt de personne de dissimuler ces réalités », déclare Nixon. À l'époque, les Canadiens, Trudeau en tête, sont fortement opposés à la guerre au Vietnam.
 
RONALD REAGAN-BRIAN MULRONEY
Personne n'oubliera le fameux sommet du trèfle (Shamrock Summit) de mars 1985 alors que le président américain débarque à Québec.
Comme larrons en foire, lui et Brian Mulroney évoquent avec fierté leurs origines irlandaises, allant jusqu'à chanter When Irish Eyes are Smiling au terme d'un spectacle donné en l'honneur du président américain.
C'est le début d'une période dorée pour les échanges commerciaux qui devait aboutir à la signature de l'Accord de libre-échange entre les deux pays. Par contre, le Canada a toujours résisté d'adhérer au projet de bouclier anti-missile parrainé par Reagan.
 
BILL CLINTON-JEAN CHRÉTIEN
Les bonnes relations entre Mulroney et Reagan se poursuivent sous l'administration Bush père. En 1993, l'ère conservatrice cède le pas à une période plus libérale avec l'arrivée de Bill Clinton et Jean Chrétien à la tête de leur gouvernement. Le passage le plus remarqué de Clinton au Canada fut sans doute celui des 23 et 24 février 1995.
À l'occasion de cette visite officielle, le président américain s'adresse à la Chambre des communes. Lorsqu'il salue la capacité des Canadiens à vivre ensemble malgré leurs différences, les députés du Bloc québécois n'ont pas applaudi. Mais lorsque le président a enchaîné en disant qu'il revenait aux Canadiens de décider de leur sort, la Chambre s'est levée d'un bloc. Les députés du Reform Party ont aussi boudé une déclaration du président où il félicitait le Parlement pour sa loi sur l'enregistrement des armes à feu.
D'accord sur l'élargissement du libre-échange en Amérique et sur un accroissement du rôle des institutions internationales, Clinton et Chrétien aimaient bien deviser autour d'une partie de golf. Comme à Mont-Tremblant en octobre 1999.
 
GEORGE W. BUSH-PAUL MARTIN
La seule visite officielle du président Bush au Canada, les 30 novembre et 1er décembre 2004, a suivi de quelques semaines sa réélection à la Maison-Blanche mais a surtout été retardé en raison de l'opposition canadienne de s'engager dans la guerre en Irak et la militarisation de l'espace.
Moins tendues qu'avec Jean Chrétien, les relations entre Bush et Paul Martin sont néanmoins moins harmonieuses qu'avec Stephen Harper.
Lors de sa visite de 2004, Bush et Martin discutent –sans faire beaucoup de progrès- de deux importants contentieux entre les deux pays : l'embargo américain sur le boeuf canadien et l'imposition de surtaxes sur le bois d'oeuvre canadien.
Les deux hommes signent également le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité auquel se joindra le Mexique un peu plus tard.