Barack Obama n'aura pas perdu de temps. À son tout premier jour de travail, hier, le 44e président des États-Unis a amorcé un grand ménage à Washington, en plus de suspendre les tribunaux militaires à Guantánamo. Surtout, il a ouvert deux chantiers colossaux:un plan de sauvetage pour une économie à la dérive et le retrait progressif des troupes américaines d'Irak.

Tout cela, et plus encore, après une bien courte nuit de sommeil, quelques heures à peine après avoir valsé avec sa femme Michelle dans pas moins de 10 bals organisés en son honneur, mardi soir, à Washington.

Les célébrations entourant l'investiture historique du premier président afro-américain s'étaient en effet poursuivies jusque tard dans la nuit. Qu'à cela ne tienne, Barack Obama avait beaucoup de pain sur la planche, hier matin.

À son arrivée au bureau Ovale, à 8h34, le nouveau président a trouvé une lettre laissée sur le bureau par son prédécesseur. «À:no 44. De:no 43», avait écrit George W. Bush sur l'enveloppe.

Après avoir lu la lettre, le président a téléphoné à quatre leaders du Proche-Orient:le président égyptien Hosni Moubarak, le premier ministre israélien Ehoud Olmert, le roi Abdallah II de Jordanie et le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

Ces premiers appels envoient un signal fort sur la volonté du président à «oeuvrer activement à la paix israélo-arabe dès le début de son mandat», a indiqué le porte-parole de la Maison-Blanche, Robert Gibbs.

Au cours des dernières semaines, Barack Obama s'est gardé d'intervenir au sujet de l'invasion israélienne à Gaza. Mardi, il n'a pas soufflé un seul mot à propos du conflit israélo-palestinien dans son discours inaugural.

Hier, le président Obama s'est déclaré «déterminé à aider à consolider le cessez-le-feu (conclu dimanche entre Israël et le Hamas) en mettant sur pied un régime efficace de lutte contre la contrebande, afin d'empêcher le Hamas de se réarmer». Il s'est aussi engagé à fournir un «effort majeur de reconstruction pour les Palestiniens à Gaza».

George Mitchell, 75 ans, devrait être nommé au poste d'émissaire américain pour le Proche-Orient. L'ancien sénateur démocrate, qui a présidé aux pourparlers de paix en Irlande du Nord, est fils d'une Libanaise.

Peu après 9h, hier matin, Barack Obama s'est rendu à la cathédrale de Washington, afin d'assister à la messe clôturant les festivités d'investiture présidentielle. Ancien athée devenu chrétien pratiquant à Chicago, le président semblait très concentré pendant le sermon, prononcé par une femme. Mais il aura eu peu de temps pour la méditation.

Une «nouvelle ère de transparence»

Dès son retour à la Maison-Blanche, le président Obama a signé cinq décrets qui changeront les façons de faire à Washington. Les innombrables groupes de pression de la capitale seront «soumis à des limites plus strictes que sous aucune autre administration dans l'Histoire», a-t-il promis. À partir de maintenant, les lobbyistes n'auront plus le droit d'offrir des cadeaux aux fonctionnaires. Ces derniers ne pourront devenir lobbyistes auprès de l'administration tant que le président sera en poste.

Annonçant le début d'une «nouvelle ère de transparence», Barack Obama a déclaré qu'il devra lui-même avoir la permission du ministre de la Justice pour garder des informations secrètes. «Depuis trop longtemps, il y a eu trop de secrets dans cette ville.»De plus, le président a annoncé le gel des salaires de ses principaux collaborateurs. «En cette période de difficultés économiques, les familles américaines sont obligées de se serrer la ceinture et c'est aussi ce que Washington doit faire.»Les salaires d'une centaine d'employés de la Maison-Blanche qui gagnent plus de 100 000 $ par an seront gelés.

Guantánamo, l'économie et l'Irak

Dans son discours inaugural, Barack Obama avait «rejeté l'idée qu'il faille faire un choix entre notre sécurité et nos idéaux». Quelques heures plus tard, dans la nuit de mardi à hier, il a demandé la suspension des procédures judiciaires entamées contre les détenus du camp de Guantánamo, symbole des excès de la guerre contre le terrorisme de George W. Bush.

Le procès du Canadien Omar Khadr a ainsi été interrompu jusqu'à nouvel ordre, tout comme celui de cinq hommes accusés d'avoir fomenté les attentats du 11 septembre. Selon un projet de décret présidentiel obtenu par l'AFP, l'administration Obama prévoit fermer le camp de Guantánamo d'ici un an.

Les hommes du président veulent rapidement faire table rase sur les années Bush.

À peine arrivé en poste, mardi, le nouveau secrétaire général de la Maison-Blanche, Rahm Emanuel, a ordonné aux agences fédérales de bloquer toutes les décisions de dernière minute prises par le «no 43». Appelés «midnight regulations», ces projets de loi sont généralement introduits en catastrophe par le président sortant, entre l'élection du 4 novembre et l'investiture du 20 janvier. Ils seront suspendus jusqu'à ce que la nouvelle administration procède à leur révision.

En ce qui concerne la dure récession qui frappe les États-Unis, Barack Obama veut faire passer rapidement un plan de stimulation économique de 825 milliards de dollars - un plan qui devrait créer, selon lui, quatre millions d'emplois. Mais l'appui des républicains n'est pas gagné. «Le défi tel que nous le voyons est de créer un plan qui aide les contribuables de la classe moyenne et les petites entreprises sans gaspiller de l'argent ni faire exploser le déficit national», ont écrit les leaders républicains au Congrès dans une lettre au président. Ils ont demandé à le rencontrer, demain, pour proposer des changements majeurs au plan de relance.

Dernier dossier, mais non le moindre:le retrait de l'Irak. Barack Obama a promis de mettre fin à l'invasion américaine, dont il est un opposant de la première heure. Hier, en fin d'après-midi, il a rencontré les principaux responsables militaires du Pentagone, leur demandant un «plan pour le redéploiement des troupes de combats dans les 16 prochains mois».

D'ici l'été 2010, la plupart des 140 000 soldats basés en Irak seraient ainsi rapatriés au pays. Cela permettrait à l'administration Obama d'envoyer jusqu'à 30 000 soldats supplémentaires en Afghanistan pour lutter contre l'insurrection talibane, qui ne cesse de gagner du terrain.Sources:Washington Post, CNN, BBC, AFP, AP