Le vice-président américain sortant Dick Cheney a défendu lundi l'emploi de la simulation de noyade contre les suspects de terrorisme, et estimé dans des entretiens que la prochaine administration pourrait se rallier à un exercice vigoureux des pouvoirs présidentiels.

Rapportés par la chaîne ABC, les propos de M. Cheney sur la simulation de noyade s'apparentent fort à une reconnaissance publique au plus haut niveau du fait que les États-Unis ont recouru contre les suspects de terrorisme à des méthodes dénoncées par leurs détracteurs comme des actes de torture.

L'administration Bush s'est volontiers retranchée derrière le secret des méthodes antiterroristes pour ne pas confirmer le recours à cette pratique. Dans le même temps, le président George W. Bush assure que les États-Unis ne pratiquent pas la torture.

Le gouvernement de Barack Obama qui s'installera le 20 janvier pourrait aussi ne pas trouver que des défauts au camp de Guantanamo, qui risque d'être plus difficile à fermer que ne le voudrait M. Obama, a dit M. Cheney, selon la retranscription de deux entretiens diffusés par la Maison-Blanche et la chaîne ABC.

«Oui», a répondu M. Cheney à la chaîne ABC qui lui demandait s'il jugeait approprié l'usage de la simulation de noyade, parmi les méthodes qui auraient été employées pour faire parler Khaled Cheikh Mohammed, le cerveau présumé des attentats du 11 septembre.

«Non», a-t-il répondu, selon la retranscription de l'entretien publié par ABC quand la chaîne lui demandait si certaines des méthodes employées contre Khaled Cheikh Mohammed ou d'autres étaient allées trop loin selon lui.

La méthode consistant à déverser de l'eau sur les voies respiratoires d'un individu immobilisé, pour provoquer la sensation de suffocation, passe pour l'une de celles employées par les États-Unis contre les terroristes présumés. Pour les détracteurs de la «guerre contre le terrorisme» déclenchée après le 11 septembre, elle est devenue, avec le camp de Guantanamo ou les abus d'Abou Ghraïb, l'un des exemples les plus éloquents des excès de ce combat.

M. Cheney avait mis l'administration dans l'embarras en 2006 en déclarant: «Cela va de soi pour moi» à une radio qui lui demandait si on pouvait plonger quelqu'un dans l'eau pour sauver des vies.

M. Cheney, un des derniers néoconservateurs à servir encore au plus haut niveau dans l'administration Bush, a défendu Guantanamo en invoquant les camps de prisonniers allemands de la Seconde Guerre mondiale pour revendiquer le droit de détenir des ennemis «jusqu'à la fin du conflit».

Fermer Guantanamo ne devrait être possible qu'avec «la fin de la guerre contre le terrorisme», a-t-il dit, ajoutant ne pas savoir quand celle-ci viendrait.

«Guantanamo a été très, très précieux. Et je pense qu'ils se rendront compte qu'essayer de le fermer sera très difficile», a-t-il dit dans un autre entretien en évoquant l'intention déclarée de M. Obama et des siens.

Dans cet autre entretien, accordé à Rush Limbaugh, animateur conservateur d'un influent programme radio, M. Cheney a estimé que la prochaine administration pourrait, avec l'exercice du pouvoir, souscrire à son interprétation très large des pouvoirs du président.

M. Cheney passe pour être le vice-président peut-être le plus puissant de l'histoire moderne des États-Unis, et l'un des plus secrets. Il passe aussi pour s'être beaucoup employé à renforcer les prérogatives du président face aux autres pouvoirs. Il serait l'un des ardents avocats des pouvoirs controversés conférés au président pour combattre le terrorisme.

«Le président croit, et je crois très profondément en un exécutif fort (...) et je pense peu probable que l'administration Obama cède à nouveau cette autorité au Congrès», a-t-il dit, envisageant même que la prochaine administration soit reconnaissante à cet égard envers l'administration Bush.