La Cour suprême des Etats-Unis a examiné mercredi si l'ancien ministre de la Justice, John Ashcroft, et Robert Mueller, le directeur du FBI, peuvent être poursuivis par un musulman pakistanais arrêté après le 11 septembre, et maltraité dans une prison américaine.

Ces deux hauts responsables de l'administration Bush sont accusés par Javaid Iqbal d'être les architectes d'une politique inconstitutionnelle d'arrestation et de détention sur des critères raciaux et religieux.

La décision des neuf sages est attendue au plus tard pour juin 2009.

Javaid Iqbal, arrêté pour une infraction à la loi sur l'immigration, a été emprisonné et interrogé cinq mois dans une prison de haute sécurité à Brooklyn au motif qu'il était un suspect «de haut intérêt». Plusieurs centaines de musulmans ont été arrêtés dans ces vagues d'enquêtes à la suite des attentats.

Il a affirmé avoir été maltraité, enfermé 23 heures sur 24 dans une cellule de confinement où la lumière était allumée en permanence, et sujet à des fouilles au corps à répétition et à des brimades. Il poursuit également les fonctionnaires de l'administration pénitiaire, soit au total 34 personnes.

M. Iqbal a ensuite été expulsé vers le Pakistan, sans qu'aucune accusation liée au terrorisme n'ait été portée contre lui.

Son avocat, Alex Reinert a affirmé devant les neuf juges mercredi que MM. Ashcroft et Mueller étaient au courant et avaient approuvé cette politique d'enquête visant certains groupes ethniques et religieux dans le sillage des attentats. Il les considère donc responsables de son application et de ses dérives. «Sur la base des informations que nous avons rassemblés, ils ont ordonné que certains groupes (ethniques) soient ciblés, interrogés, détenus», a déclaré l'avocat new-yorkais.

Les juges ont été plus dubitatifs, faisant une comparaison avec une affaire où le patron de Coca-Cola serait poursuivi en responsabilité pour une souris trouvée dans une bouteille.

«Votre plainte se base sur le principe que MM. Ashcroft et Mueller sont plus directement impliqués dans cette politique aux caractères raciaux que ne le serait le président de Coca-Cola dans le fait de mettre des souris dans des bouteilles ?», a lancé le juge Souter, laissant entendre qu'il s'agissait d'un incident qui n'était pas de leur ressort.

Le défenseur de John Ashcroft et Robert Mueller, l'adjoint au procureur général Gregory Garre, qui représente le gouvernement devant la Cour suprême, a fait valoir pour sa part que les faits et les liens directs entre ces hauts responsables et le cas Iqbal étaient insuffisamment précis pour leur être reprochés et surtout pour lever une tradition d'immunité.

Pourtant en première instance comme en appel, la justice avait refusé d'exclure ces deux responsables de la plainte du fait de l'immunité que leur apportait leur fonction.

Un autre des neuf sages a estimé que, vu l'ampleur des attentats du 11-Septembre, «on pouvait de toute évidence détenir quelqu'un seulement pour enquêter», selon le juge Scalia.