Le monde en mutation a salué hier le changement de visage et de regard à la tête de l'unique superpuissance de la planète par une majorité claire de 52%.

Mais du Mexique à la Chine, en passant par Cuba et Israël, pouvoirs et citoyens s'interrogent sur la substance de ce changement: Barack Obama n'a pas de plan comparable au «Project for a New American Century» de George W. Bush.

Le PNAC avait été produit par ses conseillers néoconservateurs dans les années 90. Il visait à renforcer sans répit l'hégémonie des États-Unis à la tête du «système mondial» (l'Empire) contre tout rival, réel ou potentiel, ennemi ou ami.

Il a plutôt engendré la débandade, l'enlisement dans des guerres coûteuses et sans issue, le meltdown financier qui menace désormais l'économie réelle, bref le déclin de l'Empire.

Il n'y a que l'Europe qui sourit à la perspective d'équilibrer ses rapports avec l'Amérique, à défaut de la remplacer à la tête de l'Empire.

L'expression «Promouvoir la dignité» est un leitmotiv de sa stratégie. Mais sa «vision du monde» reste floue, pas pour lui peut-être, pour les autres certainement.

Si flou que Benyamin Nétanyahou se dit «certain qu'Obama amènera la paix dans la région» du Proche-Orient. Étonnant, car il a été associé au PNAC, dont les concepteurs ont aussi fait sortir Israël du «carcan» du processus de paix.

À défaut d'un projet cohérent, Obama dispose d'une équipe de conseillers qui lui ont écrit des discours-clés et fourni des slogans percutants durant la campagne.

«Promouvoir la dignité» est l'un de ces slogans. Mais il a aussi dit: «Il est temps de rejeter le conseil qui dit que le peuple américain préfère un chef fort et erroné à quelqu'un qui est faible et qui a raison. Notre parti sera fort et aura raison».

Cela inquiète des penseurs comme Susan George, qui relève qu'Obama parle de retrait d'Irak pour mieux guerroyer en Afghanistan, voire au Pakistan. «Je crains qu'avec ses gros appuis financiers (600 millions US pour sa campagne), il va remilitariser l'économie pour combattre la récession», dit-elle.

Les conseillers d'Obama sont peu connus: Ben Rhodes, Denis McDonough, Sarah Sewall (une promotrice de droits de l'homme qui a réécrit le manuel contre-insurrectionnel de l'armée), le général à la retraite Scott Gration (impliqué dans l'invasion de l'Irak), et Samantha Power. La lecture de leurs écrits s'impose désormais.