John McCain, qui a largement axé sa campagne sur son patriotisme forgé dans les geôles nord-vietnamiennes, n'a pas su conquérir l'Amérique après huit années d'une administration républicaine rejetée mardi par les électeurs.

À 72 ans, John McCain a failli devenir le plus vieux président à faire son entrée à la Maison-Blanche. Mais son expérience, dont il a joué face à son rival Barack Obama, de 25 ans son cadet, n'a pas suffi à convaincre.

Désigné dès le début de l'année dans le cadre des primaires républicaines, McCain a accumulé les revers durant la campagne, qui s'est transformée en chemin de croix pour cet homme aux cheveux blancs et au ton parfois cassant.

Remis en selle début septembre par la convention républicaine, qui lui a permis de faire jeu égal dans les sondages avec son adversaire, le sénateur de l'Arizona a subi de plein fouet l'impact de la crise financière, mise par les démocrates sur le compte de la gestion républicaine.

Le 15 septembre, jour de la faillite de la banque Lehman Brothers, qui a précipité la crise, il hasarde que «les fondements de l'économie américaine sont solides», une déclaration qui le poursuivra jusqu'au bout de la campagne.

Pour faire front, le candidat se présente comme un «franc-tireur» au sein de son parti, sachant que sa seule chance de victoire est de parvenir à se détacher de l'héritage de George W. Bush, tombé à des niveaux d'impopularité jamais vus aux États-Unis.

«Je ne suis pas le président Bush», lance-t-il énervé à son adversaire lors d'un débat télévisé, alors que ce dernier vient de rappeler que le sénateur McCain a voté neuf fois sur dix en faveur des projets de l'administration sortante.

Pour sa défense, McCain n'a de cesse de rappeler qu'il s'est opposé à l'administration Bush, de Guantanamo au changement climatique en passant par la conduite de la guerre en Irak.

Mais John McCain n'a jamais trouvé la faille dans l'armure de son adversaire et a paru énervé et méprisant lors de leurs trois débats télévisés, face à un Obama calme et déjà présidentiel.

Sa campagne a donné prise à l'accusation d'incohérence.

Alors que le camp républicain jouait sur la peur, accusant Obama de «copiner avec des terroristes» ou d'être un «socialiste», une insulte dans le contexte américain, John McCain a volé au secours de son adversaire.

«Je dois vous dire que c'est un honnête homme dont vous n'avez pas à avoir peur en tant que président des États-Unis», a-t-il lancé début octobre, sous les huées de ses partisans. Quelques semaines plus tard, il accusait son rival de ne pas être à la hauteur en cas d'attaque terroriste.

Le choix comme colistière de Sarah Palin, icône de la droite religieuse et conservatrice, a mis en porte-à-faux ce pragmatique qui fut l'adversaire malheureux de George W. Bush lors des primaires de la présidentielle en 2000 et se targue de pouvoir travailler avec tous.

Si Mme Palin a électrisé la base républicaine, au point de voler la vedette à son colistier, sa désignation a aliéné le centre, alarmé par ses positions hostiles à l'avortement. Il a aussi inquiété les électeurs à l'idée de voir cette femme sans expérience nationale ni internationale remplacer en cas de malheur John McCain à la Maison-Blanche.

Abandonné par des figures de son parti comme l'ancien secrétaire d'État Colin Powell, le candidat a paru se raccrocher en fin de campagne à «Joe le plombier», un salarié désireux de racheter sa petite entreprise, érigé par les républicains en héros, menacé par la politique fiscale des démocrates.

La campagne a viré au pathétique jeudi lors d'un meeting dans l'Ohio, lorsque le candidat a appelé désespérément à la tribune le fameux Joe, qui ne s'est pas manifesté.

John Sidney McCain, né le 29 août 1936, est l'héritier d'une dynastie militaire au service des États-Unis depuis l'Indépendance, au XVIIIe siècle. Il est né d'ailleurs sur la base aéronavale de Coco Solo à Panama, à l'époque où le canal était administré par les États-Unis.

John McCain passa cinq années dans les geôles nord-vietnamiennes où il subit torture et isolement. Il en a gardé une démarche raide et des difficultés à lever les bras.

«Mon pays m'a sauvé et je ne peux l'oublier. Je me battrai pour lui jusqu'à mon dernier souffle», a-t-il lancé, ému, lors de la convention républicaine.

Père de sept enfants, dont trois adoptés, il a épousé en 1980, en secondes noces, Cindy, riche héritière d'un empire de la distribution de bière, qui a soutenu sa carrière par sa fortune et ses relations dans l'Arizona, État qu'il représente au Sénat depuis 21 ans.