Les foules se sont tues, la propagande aussi. Après deux ans de campagne électorale - depuis les déclarations des premiers candidats aux investitures jusqu'à aujourd'hui, le grand jour est enfin arrivé. Aujourd'hui, les Américains se choisissent un nouveau président, leur quarante-quatrième.

Après avoir parcouru la Floride, la Caroline-du-Nord et la Virginie, Barack Obama se trouve aujourd'hui à Chicago pour aller voter. Hier, alors qu'il continuait son sprint final, sa campagne a pris une tournure dramatique. Il a annoncé que sa grand-mère était morte. Elle ne pourra assister au dénouement de cette course historique à la Maison-Blanche.Âgée de 86 ans, elle souffrait du cancer. On la savait au plus mal. Obama avait récemment interrompu sa campagne pour se rendre à son chevet, à Hawaii.

«Elle faisait partie de ces héros tranquilles qu'on retrouve d'un bout à l'autre de l'Amérique», a lancé Obama lors d'un discours en Caroline-du-Nord. Des héros qui «chaque jour travaillent fort, s'occupent de leurs familles, se sacrifient pour leurs enfants et leurs petits-enfants», a ajouté le candidat, qui n'a pu empêcher des larmes de rouler sur ses joues.

Par voie de communiqué, la campagne de John McCain a présenté ses condoléances. Ce qui n'a pas empêché le candidat républicain, lui aussi en Floride hier matin, de lancer que «le sénateur Obama veut punir ceux qui ont du succès. Moi je veux que tous aient du succès», a-t-il dit. M. McCain a mis le paquet hier en visitant six États avant de rentrer chez lui, en Arizona, d'où il suivra la soirée électorale.

Mais avant de connaître le résultat de l'élection, une grande inconnue sera à surveiller aujourd'hui : le système de vote tiendra-t-il le coup ?

En 2000, l'élection du président avait tourné au fiasco lors d'un scrutin serré. À la fin de la soirée, tout le pays attendait de voir de quel côté allait voter la Floride pour déterminer qui, des républicains de George W. Bush ou des démocrates d'Al Gore, allaient entrer à la Maison-Blanche. Or, la Floride utilisait un système de bulletin de vote à fiches perforées que de vieilles machines peinaient à lire correctement. Pendant un mois, les scrutateurs ont dû compiler à la main les bulletins de certains districts floridiens, avant que la Cour suprême ne stoppe l'opération et désigne Bush comme vainqueur.

Le système de vote des Américains s'est-il amélioré ? Pas toujours, estiment les experts.

Le bulletin de vote des Américains est bien garni : ils doivent se prononcer non seulement sur les candidats à la présidence, mais aussi sur les représentants de l'État au Congrès, les sénateurs, la nomination de juges et une sélection de projets de loi locaux. Le défi est d'utiliser une technologie fiable qui compile rapidement les votes des électeurs.

Les deux tiers des électeurs noirciront des cases qui seront ensuite lues par un lecteur optique, une technologie jugée fiable, à moins qu'un lecteur ne brise et cause des retards.

Mais d'autres États - et certains dont le choix sera crucial aujourd'hui - utilisent des écrans tactiles. Un système qui a connu des ratés ces derniers jours lors du vote par anticipation. Les journaux américains ont rapporté plusieurs cas d'électeurs dont la machine a enregistré un vote différent de celui qu'ils avaient indiqué.

Le principal problème est que ces ordinateurs ne gardent souvent aucune trace sur papier des votes enregistrés. Lors d'un scrutin tenu récemment en Ohio, des votes ont même disparu quand les cartes mémoire ont été téléchargées dans un serveur informatique, rappelait hier le New York Times.

À la suite de ce cafouillage, la secrétaire d'État de l'Ohio a exigé que les électeurs puissent recourir à un bulletin de papier s'ils le désirent.

Mercredi dernier, un juge a exigé que les électeurs de Pennsylvanie utilisent aussi des bulletins de papier dès que la moitié des écrans tactiles d'un bureau de vote tombent en panne. Mais plusieurs autres États, dont la Virginie, n'ont pas prévu de telles mesures.

Des résultats, mais quand ?

Jour de vote, donc. Les premiers bureaux fermeront à 19 h, puis à toutes les heures ou demi-heures selon les États. Si l'un des deux candidats doit remporter une victoire claire et confortable, le nom du prochain président sera dévoilé avant la fin de la soirée. Mais si les résultats sont serrés dans certains États clés, si les médias sont incapables de faire une prédiction à partir de leurs propres sondages à la sortie des urnes, et si le dépouillement est retardé à cause d'un problème informatique ou une contestation, les Américains pourraient se coucher tard ce soir.

Et nous aussi...

- Avec Alexandre Sirois