Le dernier obstacle à des relations normales entre les Etats-Unis et la Libye a été levé vendredi avec le versement par Tripoli de l'ensemble des fonds prévus pour indemniser les victimes américaines et libyennes des confrontations entre les deux pays dans les années 1980.

La Libye avait déjà versé 300 millions de dollars sur le fonds destiné à indemniser les victimes américaines de plusieurs attentats dans les années 1980.Elle a versé 600 millions supplémentaires jeudi et les derniers 600 millions vendredi, selon le secrétaire d'Etat adjoint chargé du Proche-Orient et du Maghreb, David Welch, principal architecte de l'accord de compensation conclu en août dernier peu avant la rencontre historique de la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice avec le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.

Mme Rice a aussitôt «certifié au Congrès que les Etats-Unis avaient reçu 1,5 milliard de dollars conformément à l'accord de compensation américano-libyen», a indiqué le porte-parole du département d'Etat, Sean McCormack, dans un communiqué.

Le fonds de compensation se monte à 1,8 milliard de dollars, dont 1,5 milliard pour les victimes américaines et 300 millions pour les victimes libyennes.

Les responsables américains n'ont pas précisé si les 300 millions de dollars destinés aux victimes libyennes avaient été versés, assurant n'avoir aucun contrôle sur cette part de l'accord.

Aucun des deux gouvernements n'a officiellement indiqué qui alimentait ce fonds de compensation, mais selon un haut responsable du département d'Etat ayant requis l'anonymat, il s'agit de gouvernements étrangers et de sociétés désireuses d'investir en Libye.

«Nous sommes convaincus que cela permettra de régler toutes les grandes plaintes de façon très équitable», a indiqué M. Welch. «Dans certains cas, avec une générosité sans précédent». Il a estimé que le versement des premières compensations serait «une question de jours».

L'accord prévoit l'indemnisation des victimes américaines de l'attentat de Lockerbie, en Ecosse, qui avait fait 270 morts en 1988, ainsi que de l'attentat visant la discothèque berlinoise «La Belle», en 1986, fréquentée par des soldats américains. Cet attentat avait fait trois morts et 260 blessés.

Le fonds d'indemnisation couvre également certaines victimes britanniques de l'attentat de Lockerbie, selon M. Welch.

L'accord prévoit aussi l'indemnisation des victimes libyennes des raids américains lancés contre la Libye le 16 avril 1986, tuant 41 personnes, dont une fille adoptive du colonel Kadhafi.

Le président George W. Bush a pour sa part signé le décret d'application de cet accord, qui «règle toutes les poursuites judiciaires liées au terrorisme contre la Libye», a indiqué M. Welch au cours d'une conférence de presse.

«Ceci lève le dernier obstacle à une relation normale entre les Etats-Unis et la Libye et nous allons y oeuvrer», s'est félicité le diplomate, rappelant la «transformation historique» opérée depuis cinq ans par la Libye, ancienne bête noire des Etats-Unis devenue une alliée dans la lutte contre le terrorisme depuis qu'elle a renoncé à ses armes de destruction massive en 2003.

En 2006, les Etats-Unis avaient formellement normalisé leurs relations avec Tripoli, retirant la Libye de la liste des Etats soutenant le terrorisme et relevant les relations diplomatiques au niveau des ambassadeurs.

Mais la nomination d'un nouvel ambassadeur à Tripoli ainsi que les fonds nécessaires à la construction d'une nouvelle ambassade n'ont toujours pas été approuvés par le Congrès américain, qui exigeait que le fonds d'indemnisation ait d'abord été complètement financé.