Le Département de la Justice américain a renoncé à l'essentiel des charges retenues contre Binyam Mohammed, un détenu de Guantanamo de nationalité britannique inculpé fin mai pour avoir envisagé un attentat à la bombe nucléaire contre les États-Unis.

Selon des documents judiciaires dont l'AFP a obtenu copie mercredi, les avocats du département de la Justice assurent qu'ils «ne s'appuieront plus sur les déclarations» d'une partie du document qu'ils avaient rédigé pour justifier la détention de M. Mohammed fin août.

Il s'agit de la partie consacrée aux soupçons de «planification d'un attentat terroriste à l'intérieur des Etats-Unis», puis de sa «préparation active», ajoute le département dans des documents. Cet attentat comprenait l'usage d'armes nucléaires et de gaz toxiques dans des lieux fréquentés.

Interrogé par l'AFP, un porte-parole du département, Dean Boyd, a assuré que l'abandon de ces charges ne valait pas annulation de l'inculpation car il portait sur un autre volet judiciaire.

C'est en effet dans le cadre de la procédure que M. Mohammed a intenté devant la cour fédérale, à l'image de quelque 250 détenus de Guantanamo, pour contester sa détention (Habeas corpus), comme la Cour suprême l'a autorisé en juin, que ces charges ont été abandonnées.

«L'objectif du gouvernement dans les commissions militaires est de juger une personne pour crimes de guerre contre les Etats-Unis», a expliqué M. Boyd. Dans les Habeas corpus, il s'agit de «démontrer qu'il avait détenu ces hommes à raison comme des combattants ennemis», a-t-il ajouté.

Cité par le Washington Post, un des avocats de Binyam Mohammed, Clive Stafford Smith, estime que ce n'est «pas une coïncidence que tout ceci apparaisse quand le juge (en charge de l'Habeas Corpus) demande la divulgation» de documents classifiés.

Pour lui, il s'agit pour le gouvernement d'éviter que la justice tombe sur des documents montrant que des déclarations ont été recueillies sous la contrainte, voire la torture, avant l'arrivée de M. Mohammed, 29 ans, à Guantanamo, en 2004.

Le détenu britannique, né en Ethiopie, avait écrit fin mai une lettre au Premier ministre de son pays Gordon Brown en lui demandant d'aider à sa libération.

Il assurait être innocent et craindre la peine de mort si jamais il était condamné pour des faits de terrorisme.

«J'ai été détenu sans procès par les Etats-Unis depuis six ans, un mois et 12 jours», avait écrit M. Mohamed avant d'ajouter, «pourtant, je n'en vois pas la fin et il n'y a aucune perspective de procès équitable». Il se disait reconnaissant envers la Grande-Bretagne de son intervention publique en sa faveur.

Il avait néanmoins précisé qu'il s'agissait d'«un espoir cruel, neuf mois plus tard, je suis toujours là (...) dans cette prison horrible».

Trois hommes, qui résidaient légalement en Grande-Bretagne avant leur arrestation sans être citoyens britanniques, avaient été libérés de la base américaine en décembre 2007.