Cecil Roberts, président d'un syndicat minier de Virginie, n'y va pas par quatre chemins lorsqu'il s'adresse à des électeurs de la région des Appalaches qui hésitent à voter pour Barack Obama en raison de sa couleur.

«Vous avez le choix entre un ami noir à la Maison-Blanche ou un ennemi blanc», leur dit-il, selon la presse locale.

Un autre organisateur syndical, Jerry Stallard, tente de véhiculer le même message en rappelant aux mineurs que l'amélioration de leurs conditions de travail est plus importante que leur scepticisme vis-à-vis de la couleur, la culture ou la religion du candidat démocrate. «Nous sommes tous Noirs au fond de la mine», leur répète-t-il.

 

La crise économique

Cette approche suffira-t-elle à permettre à Obama de surmonter les divisions raciales de son pays? À moins d'un mois de la présidentielle, des partisans du sénateur de l'Illinois se méfient des sondages nationaux, le donnant vainqueur devant John McCain.

Ils se disent qu'un bon nombre d'électeurs blancs pourraient changer d'avis à la dernière minute et refuser de voter pour un Métis à la Maison-Blanche.

Mais le facteur racial pourrait bien être éclipsé, le 4 novembre, par le facteur économique. Les électeurs américains font généralement plus confiance aux démocrates pour régler les problèmes économiques. Après huit années de pouvoir républicain à la Maison-Blanche, ce réflexe pourrait encore davantage jouer en faveur de Barack Obama.

La remontée du candidat démocrate dans des États qui ont voté pour George W. Bush en 2000 et 2004 coïncide d'ailleurs avec la crise financière et la détérioration économique aux États-Unis. Que ce soit en Virginie, en Floride ou en Ohio, Obama semble avoir réussi une percée auprès des Blancs de la classe ouvrière qui lui avaient préféré Hillary Clinton lors de la course à l'investiture démocrate.

Jeanette Lunsford a pu constater ce phénomène en faisant du porte-à-porte dans le comté de Scioto, dans l'Ohio.

«Il y a un pourcentage d'électeurs qui ne voteront pas pour Obama en raison de sa couleur. Peut-être 10 %», dit-elle au cours d'une entrevue téléphonique. «Mais certains disent qu'ils voteront pour lui, en dépit du racisme, parce qu'il est le meilleur candidat pour l'économie.»

Le magazine Time est arrivé à une conclusion semblable en visitant récemment une circonscription baromètre d'un État baromètre (le Missouri). Depuis plus d'un demi-siècle, les électeurs du comté de Lincoln ont toujours voté pour le vainqueur de la Maison-Blanche. Issus pour la plupart de la classe ouvrière blanche, ceux-ci semblent être prêts à jeter leur dévolu sur Barack Obama.

Comme en Ohio, l'économie semble inciter plusieurs électeurs du Missouri à voir le sénateur de l'Illinois sous un autre oeil. «Obama semble être plus prêt des gens comme moi, a déclaré une électrice au journaliste du Time. Il se bat pour les gens.»

Républicains

L'équipe de John McCain a bien compris que le thème de l'économie ne l'avantageait pas. «Si nous continuons à parler de la crise financière, nous allons perdre», a confié un des conseillers du sénateur de l'Arizona au Daily News de New York.

Le camp McCain a ainsi passé la dernière semaine à attaquer Obama en le présentant comme un étranger dangereux qui ne partage pas les valeurs des Américains et qui fréquente des terroristes. «Qui est le vrai Barack Obama?» a répété McCain. Sarah Palin, sa colistière, a fourni sa propre réponse : «Ce n'est pas un homme qui voit l'Amérique comme vous et moi. C'est quelqu'un qui voit l'Amérique comme étant assez imparfaite pour copiner avec des terroristes qui veulent cibler leur propre pays».

La gouverneure d'Alaska faisait référence à la relation passagère de Barack Obama avec William Ayers, un professeur à l'Université d'Illinois à Chicago qui a appartenu à un groupe radical dans les années 60 et 70.

En Floride comme en Pennsylvanie, John McCain et Sarah Palin ont pour leur part été présentés par des orateurs qui ont soulevé la foule en prononçant le nom complet du candidat démocrate - Barack Hussein Obama - sur un ton méprisant ou menaçant.

Des partisans de McCain et de Palin n'ont pas cherché à cacher leur haine vis-à-vis de Barack Obama, le traitant haut et fort de «terroriste» et de «traître» ou appelant à sa mort («Tuez-le!»).

Il est évident que certains partisans du ticket McCain-Palin tombent dans la catégorie des intolérants. Reste à savoir si ce sentiment peut stopper l'élan de Barack Obama dans le reste de l'électorat.