En prononçant son discours devant la Convention républicaine, Sarah Palin a fait l'éloge du lieu qui l'a vu grandir: un patelin typiquement alaskien, peuplé de vaillants travailleurs. Un havre de paix loin de Washington. C'est pourquoi en arrivant à Wasilla, on se demande si on s'est trompé d'adresse.

Certes, la vallée de Mat-Su dans laquelle se trouve Wasilla est entourée de pics enneigés. Mais la carte postale s'arrête là.

 

Sur des kilomètres et des kilomètres, des magasins de bois, des vendeurs d'armes et des prêteurs sur gage côtoient des grands magasins et des épiceries. La rue principale est l'inverse d'un chemin de campagne: c'est une autoroute à quatre voies.

Attablé au Trout Place pour le petit-déjeuner, sous une truite empaillée à l'air hagard, Richard Brown soupire en parlant de Wasilla. Ami des parents de Sarah Palin, il vit ici depuis 1976. «Quand je suis arrivé, Wasilla était encore un village. L'école secondaire était sur un chemin de terre battue. En grande partie, le développement de la ville est l'oeuvre de Sarah. Mais ce n'est pas toujours une bonne chose», laisse-t-il tomber en plantant sa fourchette dans sa saucisse de caribou, une spécialité locale.

Lors de son passage à la mairie, Sarah Palin a ouvert grand la porte au développement commercial, parfois au détriment des plus belles ressources locales. Le lac Wasilla, jadis le poumon du village, est aujourd'hui bordé par un grand magasin et par l'autoroute.

Attribué par plusieurs à l'ancienne mairesse, le développement économique est aussi intimement lié au boom pétrolier des dernières décennies. L'exploitation de gisements dans le nord de l'État attire des travailleurs du Lower 48, les États du Sud. «Nous les appelons les boomers. Ils sont ici pour s'enrichir le plus vite possible et repartir. Pas pour préserver la qualité de vie et de l'environnement à Wasilla», explique Nancy Carrington, ancienne compagne de classe de Sarah Palin. Depuis son enfance, la population de la vallée - aujourd'hui plus de 30 000 personnes - a été multipliée par six.

Bien que le «centre-ville» de Wasilla ait les airs d'une banlieue typiquement américaine, la nature n'est jamais bien loin. Sarah Palin vit sur le bord du lac Lucille. En se levant le matin, elle ne voit pas l'immense boulevard commercial qu'elle a créé, mais des rangées de grands bouleaux de l'autre côté du lac.