Les immigrants chinois débarquent par milliers au Québec. Entre 2001 et 2006, ils étaient plus de 16 000 à s'établir dans la grande région de Montréal, devançant les Algériens et les Marocains. Pourtant, on entend très peu parler d'eux.

« Nous sommes nombreux, mais peu influents », résume Xixi Li, directrice du Service à la famille chinoise du Grand Montréal. « Parce que 86 % des Chinois sont de première génération. On n'a pas de soeurs ou de frères qui travaillent à Hydro-Québec et qui peuvent nous donner des conseils ! »Le silence est aussi une question de « caractère », croit Xixi Li. « On ne se plaint pas, on travaille. » Si le taux de chômage des immigrants chinois est inférieur à celui d'autres communautés, cela tient au fait qu'ils acceptent plus facilement le déclassement. « Ils préfèrent le salaire minimum au bien-être social. » Des médecins chinois qui travaillent au salaire minimum ici, oui, il y en a.

Bien que le Collège des médecins affirme qu'il est possible pour des médecins chinois de pratiquer au Québec, le Service à la famille chinoise, qui a vu trop de gens s'enliser dans des démarches ne menant à rien, demeure sceptique. « On suggère aux gens de ne pas perdre de temps avec ce processus », dit Xixi Li.

Un parcours de combattant pour le médecin étranger ? Oui, tout à fait, note Marie-Thérèse Chicha, professeur en relations industrielles à l'Université de Montréal. Le processus est long, coûteux et semé d'embûches. « Ça brise des vies. J'ai rencontré des gens très déprimés. » Fait intéressant, les immigrants qui finissent par réussir sont souvent ceux qui se sont vite dissociés des membres de leur communauté qui leur ont dit qu'ils n'allaient pas y arriver, observe-t-elle.

Quant au médecin qui voudrait travailler comme infirmier, il devra aussi s'armer de persévérance et retourner sur les bancs d'école. « Un médecin, c'est un médecin. Une infirmière, c'est une infirmière », dit Lise Provost, de l'Ordre des infirmières du Québec.

Même s'ils sont de plus en plus scolarisés, les nouveaux arrivants chinois se buttent à de nombreux obstacles (difficulté à faire reconnaître leurs compétences, difficulté à apprendre la langue, discrimination). Et nombreux sont ceux qui, après un an ou deux, quittent le Québec, déçus. Seulement 54 % des immigrants d'Asie orientale admis au Québec entre 1997 et 2006 y vivaient encore en 2008. « Dans d'autres cas, les femmes et les enfants restent ici alors que les hommes rentrent en Chine, précise Xixi Li. Il y a aussi beaucoup cas de divorces. »