Notre journaliste couvre le congrès annuel de l'Association américaine pour l'avancement de la science (AAAS) à San Jose, en Californie. C'est la plus grande rencontre de science généraliste au monde.

L'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest pourrait se prolonger jusqu'à l'an prochain, ont avancé samedi des hauts placés de la santé publique internationale au congrès de l'Association américaine pour l'avancement de la science (AAAS) à San Jose. Pire, les pays voisins sont moins prêts que prévu à faire face à une éclosion de la maladie chez eux.

«Il est très difficile de savoir quand se terminera l'épidémie, explique Iza Ciglenecki, directrice de la recherche de Médecins sans frontière (MSF). La situation semblait s'améliorer, mais depuis quelques semaines en Guinée et en Sierra Leone, le nombre de cas ne descend plus et parfois, augmente.»

Depuis le début de l'épidémie, l'été dernier, 23 000 personnes ont été atteintes et 9200 en sont mortes. La Sierra Leone a eu le plus grand nombre de cas et le Liberia, le plus grand nombre de morts. La Guinée, où a commencé l'épidémie, a été moins touchée, mais les progrès sont plus lents.

Quand un journaliste a demandé quand finirait l'épidémie, les quatre panélistes - la Dre Ciglenecki, Kenji Fukuda, qui dirige la réponse aux épidémies à l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Anthony Fauci, directeur de l'Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID) du gouvernement américain, et Stephen Gire, épidémiologiste de l'Université Harvard qui a été le premier à décrire comment le virus s'est propagé en Afrique de l'Ouest - se sont longuement consultés du regard. «On ne peut pas faire de prédictions, a fini par dire la Dre Ciglenecki. Il se peut qu'il faille attendre un vaccin.» Les sociétés qui testent des vaccins contre l'Ebola ont indiqué qu'aucun d'eux ne serait prêt avant 2016, au plus tôt.

«Avec la grippe ou d'autres maladies infectieuses plus courantes, on sait comment les courbes du nombre de cas évoluent, a ajouté le Dr Fauci, qui est le patron du NIAID depuis 31 ans. Ici, on est régulièrement surpris. Il faut noter qu'avec d'autres virus, on peut vivre avec un faible nombre de cas. Avec l'Ebola, il nous faut arriver à zéro cas.» Comme la période d'incubation du virus est de 42 jours, il faudra attendre près d'un mois et demi après le dernier cas enregistré pour déclarer victoire.

Un autre indicateur du succès de la lutte contre l'Ebola est la proportion de nouveaux patients qui proviennent des listes de personnes avec qui des patients existants ont été en contact. «Quand un nouveau patient n'est pas sur ces listes, ça veut dire qu'il a contacté la maladie dans un foyer que nous ne connaissons pas, dit la Dre Ciglenecki. En Guinée, seulement 15% des nouveaux patients sont sur les listes. C'est très bas. D'ailleurs, on voit aussi apparaître des cas dans de nouvelles régions en Guinée.»

Léger désaccord

Un léger désaccord planait entre les Drs Ciglenecki et Fukuda au sujet des leçons à tirer de la crise. «Il faut surtout solidifier les systèmes de santé des pays individuels, pour qu'ils puissent isoler les patients et circonscrire l'épidémie rapidement, a dit le Dr Fukuda. D'ailleurs, les pays voisins sont moins préparés que nous ne le pensions cet automne.» La Dre Ciglenecki a ajouté que «les pays touchés ne peuvent pas s'en sortir seuls» et ont «besoin d'un système international d'intervention médicale plus fort et plus rapide», notant que MSF a sonné l'alarme au sujet de l'Ebola avant l'OMS.