La France a procédé samedi aux premiers contrôles de passagers en provenance d'un pays ouest-africain touché par Ebola dans un contexte d'inquiétude en Europe et aux États-Unis, où le président Barack Obama a exhorté la population à «ne pas céder à l'hystérie».

Alors que le bilan de l'épidémie s'élève à 4555 morts et 9216 cas enregistrés, essentiellement au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée selon les derniers chiffres publiés vendredi par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'ONU, la Banque mondiale et l'ONG britannique Oxfam appellent à une aide internationale accrue à l'égard des pays africains touchés.

Pour la première fois, les passagers du vol quotidien Air France reliant la capitale guinéenne Conakry à Paris ont été dépistés avec un thermomètre laser à leur arrivée à l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Une femme d'une quarantaine d'années, présentant de la fièvre, a été prise en charge par les équipes de l'hôpital parisien Bichat.  Mais, «une heure après sa sortie de l'avion, elle n'avait plus que 37,5°C. Elle n'avait ni vomissements ni diarrhée», a-t-on appris de source proche du dossier.

Dans la soirée, un autre cas suspect a été signalé au nord-ouest de Paris: «une femme qui présentait des symptômes, douleurs abdominales et fièvre», a précisé sur la chaîne d'information i-Télé un responsable local. Selon lui, cette femme «a été mise à l'isolement» à l'hôpital militaire Bégin en région parisienne, pour des analyses dont les résultats n'étaient pas connus samedi soir.

Le ministère de la Santé n'a souhaité faire «aucun commentaire», rappelant qu'il «informerait immédiatement la population» si un cas d'Ebola devait être confirmé en France.

Éviter la psychose

Ce contrôle, déjà en vigueur en Grande-Bretagne et dans plusieurs aéroports américains, a uniquement été mis en place sur le vol venant de Conakry, seule liaison directe entre la France et l'un des trois pays d'Afrique de l'Ouest les plus touchés.

Reflétant la volonté des autorités en Occident d'éviter la psychose, le président Barack Obama a demandé samedi aux Américains de ne pas «céder à l'hystérie ou à la peur», les appelant à se baser sur les faits et s'opposant à la tentation de restreindre les vols vers et au départ d'Afrique de l'Ouest.

Le pays ne fait pas face à une «épidémie», a assuré le président des États-Unis, où deux membres du personnel soignant ont été infectés et où un patient libérien, de retour de son pays, est mort du virus. Il a néanmoins admis que de nouveaux cas «isolés» étaient possibles.

Afin d'apaiser les craintes, M. Obama a nommé vendredi un coordinateur, l'avocat Ron Klain, qui devra s'assurer que «les efforts pour protéger les Américains en détectant, isolant, et traitant les patients d'Ebola dans ce pays soient coordonnés».

Mais la peur d'une contagion de masse par le virus gagne du terrain en Occident.

Les autorités portuaires mexicaines ont refusé vendredi à un bateau de croisière de faire escale à Cozumel en raison de la présence à bord d'une laborantine d'un hôpital texan qui a pu être en contact avec le patient libérien mort du virus Ebola à Dallas le 8 octobre.

Une institutrice d'une école du Maine, aux États-Unis, a été placée en congé forcé pour trois semaines après avoir assisté à une conférence éducative à Dallas.

Dans ce contexte, l'unique information positive a été annoncée par l'OMS: le Sénégal, qui avait déclaré un cas, désormais guéri, ne doit plus être considéré comme un pays touché par Ebola. La même annonce devrait suivre lundi pour le Nigeria.

Appel à l'aide internationale

Mais l'aide se fait attendre et les appels pour convertir en actes les promesses internationales d'aide se font de plus en plus pressants.

L'ONG britannique Oxfam a exhorté samedi les dirigeants européens à faire davantage pour lutter contre Ebola, notamment avec une présence militaire accrue, davantage de médecins et de fonds, afin «d'éviter l'ultime catastrophe humanitaire de notre génération», à l'avant-veille d'une réunion au Luxembourg sur le sujet.

«Nous sommes en train de perdre la bataille» face au virus, a déploré vendredi à Paris le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim.

Les Nations unies ont reçu jusqu'à présent 377 millions de dollars sur les 988 millions demandés, soit 38%, a relevé vendredi un porte-parole de l'OCHA (Bureau des Affaires humanitaires de l'ONU) à Genève. «Il faut y ajouter 217 millions de dollars promis, mais qui ne sont pas encore arrivés sur les comptes bancaires», a-t-il précisé.

Le fonds spécial de l'ONU mis en place pour parer aux urgences, le «Trust Fund», ne dispose pour sa part que de 100 000 dollars sur les 20 millions initialement requis.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a annoncé de son côté le lancement immédiat d'une distribution d'aide à 265 000 habitants de Freetown, la capitale de Sierra Leone où le ministre de la Défense Alfred Paolo Conteh a été nommé à la tête de l'organisme national de lutte contre Ebola.

La Communauté d'Afrique de l'Est (EAC) a décidé vendredi d'envoyer plus de 600 professionnels de santé, dont 41 médecins, en Afrique de l'Ouest.

Londres a de son côté envoyé en Sierra Leone un navire militaire médicalisé qui devrait arriver dans deux semaines à Freetown. Au total, la Grande-Bretagne prévoit d'envoyer 750 militaires dans son ancienne colonie pour aider notamment à la construction de centres de traitement.

Le leader cubain Fidel Castro a, lui, proposé samedi aux États-Unis de collaborer dans la lutte contre Ebola pour éviter une épidémie sur le continent. En dépit de ses difficultés économiques et de ses maigres moyens, Cuba a envoyé 165 professionnels de santé en Afrique auxquels doivent s'ajouter des renforts les jours prochains.