Les responsables de santé publique des États-Unis ont tenté de rassurer les Américains jeudi après une série d'erreurs ayant conduit à la contamination de deux infirmières par le virus Ebola, qui alimentent la peur croissante de contagion dans le pays.

Le docteur Thomas Frieden, directeur des Centres fédéraux de contrôle et de prévention des maladies (CDC) et à ce titre le visage de la réponse américaine à Ebola, a défendu, devant des parlementaires très incisifs, les mesures mises en place pour stopper l'épidémie, notamment au sein du personnel soignant qui est en première ligne.

«Ebola n'est pas nouveau, même s'il est nouveau aux États-Unis. Nous savons comment mettre Ebola sous contrôle», a déclaré Thomas Frieden. «Les CDC travaillent 24 heures sur 24 pour protéger les Américains», a-t-il décrit, en insistant sur le suivi systématique des personnes étant entrées en contact avec des patients atteints.

Mais, signe de la controverse qui enfle et de son tour de plus en plus politique, des élus ont interrompu leur campagne électorale pour revenir, le temps de l'audition parlementaire, à Washington.

«Les gens ont peur», a lancé Fred Upton, président républicain de la commission sur l'Énergie et le Commerce et adversaire traditionnel de l'administration Obama. «Et la réponse à ce jour a été inacceptable».

Les CDC ont renforcé assistance et formations aux hôpitaux et recommandent à ces derniers de réduire «au minimum absolu» le nombre de personnels soignants s'occupant de cas suspects.

Nina Pham, la première infirmière contaminée à Dallas après avoir été au chevet du Libérien Thomas Eric Duncan, décédé le 8 octobre, est dans un état qualifié de «bon». Elle devait être transférée jeudi dans l'un des quatre établissements hospitaliers américains équipés de chambres d'isolement maximum pour les patients les plus contagieux, aux Instituts nationaux de santé à Bethesda près de Washington.

«Je suis reconnaissante de tout ce que mes collègues ont fait pour me soigner» à Dallas, a déclaré la jeune femme dans un communiqué diffusé par l'hôpital, Texas Health Presbyterian.

«Je vais très bien grâce à cette équipe, qui est la meilleure du monde», a ajouté Nina Pham.

L'autre infirmière infectée, Amber Vinson, a été transférée mercredi à l'hôpital universitaire d'Emory à Atlanta.

Pas de formation Ebola

Une polémique a éclaté sur les équipements de protection des soignants, et notamment les protocoles pour les enlever et les détruire, après la contamination des deux infirmières.

Depuis le début de la crise, les incidents se multiplient. La seconde infirmière diagnostiquée, Amber Vinson, a obtenu l'autorisation par téléphone de prendre l'avion lundi de Cleveland à Dallas malgré une légère fièvre de 37,5 degrés Celsius, ce qui a encore élargi le cercle possible de contaminations.

Les consignes étaient alors d'interdire les déplacements des soignants si leur fièvre dépassait 38 degrés, mais selon une source ayant connaissance du dossier, l'infirmière pourrait avoir été plus malade qu'elle ne le laissait entendre.

Des établissements scolaires du Texas (sud) et de l'Ohio (nord), qui accueillent des élèves ayant voyagé avec elle, étaient fermés jeudi pour être nettoyés.

Les CDC envisagent aussi d'abaisser le seuil à partir duquel les soignants seraient interdits de voyager, a appris l'AFP.

Daniel Varga, le chef clinique de Texas Health, qui inclut l'hôpital de Dallas, a reconnu durant l'audition parlementaire de jeudi qu'aucun personnel d'urgences n'avait reçu de formation spécifique à Ebola quand Thomas Eric Duncan s'y est présenté fin septembre.

De plus en plus de responsables du Congrès réclament la fermeture immédiate des frontières pour les personnes en provenance des trois pays foyer de l'épidémie (Guinée, Liberia, Sierra Leone), en suspendant la délivrance de visas à leurs ressortissants ou en interdisant aux non-Américains ayant voyagé là-bas de se rendre aux États-Unis.

Mais l'administration Obama estime que cette mesure produirait les effets inverses, car des voyageurs déterminés peuvent toujours se rendre par la route dans l'aéroport d'un pays voisin, ou simplement dissimuler leur pays de provenance dans les formulaires de déclaration.

Actuellement, «nous sommes capables de trier à l'arrivée et de déterminer le niveau de risque» des passagers à partir des informations recueillies dans les cinq aéroports américains qui ont mis en place des questionnaires détaillés, a expliqué Thomas Frieden. Avec une interdiction de voyage, «nous perdrions ces informations».